16. Une famille de chez nous : les Carolingiens (VIIIe – Xe siècles)

Avec les Carolingiens, l’aristocratie terrienne franque triomphe. Au début du VIIIe siècle, l’effacement progressif de la dynastie mérovingienne se fait au bénéfice du maire du palais. Ce haut fonctionnaire est, à l’origine, major-domus, gestionnaire de la vie matérielle du palais ; il devient très vite administrateur des domaines royaux ; recruté parmi l’aristocratie régionale, il en prend la tête et en défend les intérêts. Il est, au fil du temps, le véritable détenteur du pouvoir.

C’est le cas de Pépin le Bref, puissant maire du palais, riche propriétaire terrien, vers qui se fixèrent les fidélités qu’on le savait capable de bien rémunérer. À la suite du coup d’état de 751, avec l’accord du pape Zacharie (741-752) qui avait besoin de la puissance franque pour repousser les Lombards, Pépin se fait élire roi à Soissons par les grands du royaume. En 754, à l’invitation de Pépin, le pape Étienne II (752-757) se rend en Francie et y sollicite l’appui des Francs. Dans la basilique de Saint-Denis, le 28 juillet 754, le pape sacre Pépin ainsi que ses deux fils, dont le futur Charlemagne. La dynastie carolingienne est née. « Cette dynastie regroupe, depuis la fin du VIIe s., une branche mosane et ardennaise, dite des Pippinides[1], autour de Liège, et une branche messine et mosellane, les Arnulfiens[2], autour de Metz et Trêves. »[3]

« Au début du VIIIe s., le centre de gravité économique s’est lentement déplacé du Midi méditerranéen vers le Nord européen ; les conquêtes musulmanes n’y sont pas étrangères. Face au Midi ruiné, se dresse un espace nordique prospère avec de nombreux ports. La Meuse, le long de laquelle, de Verdun à Liège, apparaissent des bourgs actifs, devient l’axe économique européen centré désormais sur la mer du Nord. »[4] Le berceau de Pippinides se situe justement autour de l’axe que constitue la Meuse. « Plus de quatre-vingt-dix grands domaines agricoles leur appartenant ont été recensés de part et d’autre du fleuve dans la partie wallonne de la Belgique actuelle. »[5] Les surnoms des ancêtres en témoignent : Pépin Ier de Landen (+ 640), Pépin II de Herstal (+ 714) possédaient de vastes domaines fonciers en Hesbaye, dans le Brabant, en Namurois, dans la région de Liège comme Chèvremont, Jupille. Ils avaient aussi fondé de nombreux monastères : Andenne, Nivelles, Fosses ; sans oublier Stavelot-Malmédy qu’ils ont largement doté.

[1] Terme formé à partir du nom de l’ancêtre de la famille : Pépin.

[2] Famille d’Arnould, évêque de Metz, dont le fils épousera la fille de Pépin de Landen. Ils donneront naissance à Pépin de Herstal.

[3] Bruno DEMOULIN et Jean-Louis KUPPER (dir.), Histoire de la Wallonie, Toulouse, 2004, p. 96.

[4] M. BALARD, J.-Ph. GENET, M. ROUCHE, Le Moyen Âge en Occident, Paris, 2011, p. 44.

[5] Ibidem, p. 44. Carte ci-dessus extraite de Geneviève BÜHRER-THIERRY et Charles MÉRIAUX, 481 La France avant la France, Paris, 2010, p. 279.