Notre Curé nous parle – 27 septembre 2020

«Su dîmègne 27 sètimbe, c’est lû fièsse dû nos Communauté ! Djif sohête one clapante djournèye avou vos fàmile è tô lès sis qui vos vèyo volti… è to lès ôtes avou ! »

Je suis aussi content de vous retrouver en ce début d’automne pour traverser cette saison avec vous !

L’automne est ce temps de descente de la lumière des jours. Jours qui peuvent être très pluvieux, mornes mais aussi très lumineux. Avec une certaine douceur de l’air. L’automne nous verra cette année encore célébrer tous nos saints et faire mémoire de nos défunts. À ce propos, cette semaine, nous avons eu une rencontre réunissant les équipes funérailles de Spa et Theux ainsi que nos téléphonistes. Elle a été fructueuse, je pense, sous la houlette de François Xavier. Lors des échanges sur le vécu, sont revenues de sempiternelles réflexions. Que l’on évoque des choix autour de la crémation, si pas de l’euthanasie de plus en plus fréquente ou du moins déclarée, il est rapporté mais nous entendons ceci dans notre quotidien : « Je ne veux pas de tracas pour… » « Ce sera plus facile de… » « Je ne veux pas être un poids pour… » Au-delà d’une louable intention de bien faire, n’y a-t-il pas une prudence à avoir si pas quelque canard dont il faille couper les ailes ?

Les réflexions évoquées me renvoient à ma propre expérience d’il y a quelques années. Mes propres parents ont décidé de « se faire brûler » comme ils disaient « pour que je n’aie pas le souci d’une tombe ». Ils disaient cela alors qu’eux-mêmes faisaient le tour des tombes à la Toussaint et visitaient la famille, sans jamais se plaindre. Ce tour des cimetières était un rituel qui faisait que nous nous retrouvions avec des proches, au moins un fois l’an… Mes parents faisaient aussi l’expérience de ne pouvoir aller sur un endroit précis pour se recueillir en mémoire d’un oncle et d’une tante qui avaient fait le choix de la dispersion. Nous voyions leur fils aussi démuni, disant ne croire à rien mais faisant fidèlement le tour des tombes et demeures familiales… À l’époque, n’ayant que l’expérience des décès des aînés disparus et entourés de rituels bien établis (chambre mortuaire, dais de funérailles, passage à l’église et cimetière), j’écoutais mes parents et je me taisais. En fait, je ne savais « ce que c’était mon bien !? » Quand la société a installé des points de repère, on ne se pose pas trop de questions. Même si ce n’est pas trop notre affaire, c’est comme ça, un point c’est tout. Ce n’est que lorsque le parcours imposé est déjà bien entamé que nous commençons à sentir certains bienfaits. Mais aujourd’hui ? Les pistes autour du deuil se multiplient voire parfois se simplifient, je dirais, peut-être dangereusement. Au risque d’ajouter un vide de la présence de l’être aimé, un vide de prise en compte qu’un deuil commence… Et tout ça commence souvent par une décision basée sur « On ne veut pas déranger nos enfants ».

Je fais ici une petite incise historique pour montrer que les rites ne sont pas immuables bien que toujours là sous une forme ou une autre. Le vécu traditionnel que j’ai évoqué plus haut à demi, j’ai découvert qu’en fait, il n’était pas si ancien. C’est la période de la Révolution française qui a vu introduire des nouveaux accents par romantisme et goût pour l’Antiquité. Les repas de funérailles, l’émergence plus marquée de la fête des Morts avec démarche aux cimetières et retrouvailles familiales, participation au cortège des funérailles, tombes personnelles ou caveaux de familles… tout cela était quasi inexistant dans les temps précédents. Bref nous avons hérité d’un ensemble de rites qui marquaient à la fois l’importance de la personne et la place de la collectivité. Peut-être que cet héritage était devenu trop rigide avec une certaine perte de sens ? Néanmoins si, pour une part, il a fait son temps, il s’agit de retenir qu’il a produit ses effets. Aujourd’hui, nous sommes choqués par les fosses communes qui étaient courantes jusqu’au XVIIIème siècle. Aujourd’hui, même avec des cimetières parfois à l’abandon, nous sommes dans l’émoi lors de saccages vus comme des profanations…

Que retenir de ce que j’ai évoqué ? Je note que la disparation de codes et l’arrivée d’autres n’est que peu ou pas compensée par un dialogue rendu nécessaire d’abord, me semble-t-il, par l’absence de normes bien établies ou par une créativité qui risque de ne pas toujours être de bon aloi. Par exemple, la présence d’un écran évoquant le défunt et sa vie peut être un bon support de recueillement mais aussi une fameuse source de distraction lors de visites ou de célébrations…

Ensuite, je note aussi que les choix posés ne sont pas toujours très personnels. Que des « on » exprimés au lieu de « je » ou « nous ». Pour un dialogue, il faut un sujet qui s’exprime et aussi qui suscite un « tu » ou un « vous ». Sinon, il y a beaucoup de « pour que » qui apparaissent et qui risquent de cacher bien des non-dits…

Enfin, je suis convaincu que ce type de démarche ne tombe pas du Ciel… quoi que… Une réflexion personnelle, un dialogue authentique ne se nourrissent que de choix, de priorités et de convictions forgés au fil du temps. Il y a un temps pour chaque chose, nous rappelait, il y a peu le sage Qohélet. « Il y a un moment pour tout, et un temps pour chaque chose sous le ciel : un temps pour donner la vie et un temps pour mourir…, un temps pour se taire et un temps pour parler, … Toutes les choses que Dieu a faites sont bonnes en leur temps… » (Qo 3.1-11). Oser le dialogue au-delà de nos peurs ou de nos volontés de puissance, c’est entrer dans cette dynamique que Paul évoque : « Frères, s’il est vrai que, dans le Christ, on se réconforte les uns les autres, si l’on s’encourage avec amour, si l’on est en communion dans l’Esprit, si l’on a de la tendresse et de la compassion, alors pour ma joie soit complète, ayez les mêmes dispositions, le même amour, les mêmes sentiments : rechercher l’unité… que chacun de vous ne soit pas préoccupé de ses propres intérêts, pensez aussi à ceux des autres. Ayez en vous les mêmes dispositions qui sont dans le Christ Jésus » (Ph 2.1-11). Il n’est jamais trop de tard pour bien faire ou faire le bien. L’évangile de ce dimanche nous le rappelle au travers de la parabole des deux fils et de la question de Jésus : « Lequel des deux a fait la volonté du père ? » (Mt 21.28-32).

Quels que soient les tabous de nos vies, le deuil, la souffrance, oui mais encore… il est essentiel pour nous et nos proches qu’ils commencent à passer des ténèbres à la lumière. C’est la vérité qui rend libre. Mais au bon moment et dans le respect de chacun et de son rythme. Moi, il m’a fallu des années pour mener un dialogue sur la mort avec mes parents. Oui, il y a eu des incompréhensions ; oui, il y a eu des lacunes comme dit plus haut mais, au bout du compte, ils sont partis apaisés et moi, j’ai vécu sereinement leur départ. Avec l’aide de Dieu, toujours.

J’ai conscience de ce que cette page a de sérieux mais j’espère qu’elle répond à certaines attentes qui m’ont été exprimées par certains, en ces temps difficiles et parfois pesants. Pour la semaine qui vient, je vous souhaite de travailler avec légèreté à la vigne du Seigneur. L’automne, c’est le temps des vendanges, de la récolte, ne l’oublions pas !

Jean-Marc,
votre curé

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