CLÉS POUR LIRE MATTHIEU : 42. LES CLÉS DU ROYAUME

Clés pour lire l’évangile de Matthieu

Dans cette série hebdomadaire, nous voulons fournir des clés pour ouvrir et apprécier l’évangile de Matthieu dont nous suivons la lecture liturgique. Aujourd’hui : Mt 16, 13-20 du 21e dimanche ordinaire.

La foi de Simon-Pierre
« Tu es Pierre, et sur cette pierre je bâtirai mon Église. » (Mt 16, 18) 

Trois questions, portant sur l’identité de Jésus, ponctuent notre récit pour aboutir à une formule qui définit la foi de l’Église : « Tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant ! » (16, 16) La réponse de Pierre est sans doute la reprise d’un « credo » liturgique familier à la communauté de Matthieu.

« Heureux es-tu, Simon car ce n’est pas la chair et le sang qui t’ont révélé cela. » (16, 17) Et Jésus reconnaît que « sur cette pierre je bâtirai mon Église. » (16, 18) Mais quelle est cette pierre, cette pierre de fondation sur laquelle est bâtie l’Église ? Est-ce la personne de Pierre ? C’est surtout la foi en Jésus qu’il vient de proclamer. Car l’Eglise, c’est l’assemblée des croyants qui reconnaissent en Jésus le Messie et le Fils de Dieu.

Les clés du Royaume
Traditionnellement, saint Pierre est représenté tenant deux clés liées, une d’or (le ciel) et une d’argent (la terre). Il a les clés du ciel et de la terre qui symbolisent le pouvoir suprême, celui de lier et de délier pour l’éternité ; le couple lier/délier (vocabulaire juridique du judaïsme) signifie l’acte d’autorité qui décide ce qui est permis et ce qui est défendu. Les deux clés sont liées ensemble car le pouvoir d’ouvrir et de fermer appartient à un seul, l’intendant qui ouvre et ferme l’accès à la maison du maître. Ce pouvoir fait de saint Pierre, selon la légende, le portier ou concierge du paradis. A partir du XIIIe s., il est représenté vêtu comme un évêque ou un pape ; les deux clés figurent dans les armes pontificales avec la tiare à partir de la fin du XIIe s.

Abbé Marcel Villers

CLÉS POUR LIRE MATTHIEU : 41. UN PIEGE

Clés pour lire l’évangile de Matthieu

Dans cette série hebdomadaire, nous voulons fournir des clés pour ouvrir et apprécier l’évangile de Matthieu dont nous suivons la lecture liturgique. Aujourd’hui : Mt 15, 21-28 du 20e dimanche ordinaire.

Jésus pris au piège
« Femme, grande est ta foi. » A l’heure même, sa fille fut guérie. (Mt 15, 28)

 Lorsque la femme, une païenne, se jette à ses pieds, Jésus la rejette : « Il n’est pas bien de prendre le pain des enfants – les Juifs – pour le jeter aux petits chiens – les païens. » (15, 26). La femme, loin d’être scandalisée, saisit la balle au bond : « puisque les chiens sont tolérés dans la maison, alors j’accepte d’être un chien pour recevoir les restes, ce qui tombe de la table. » Non pas pour elle, mais pour son enfant, « sa fille tourmentée par un démon. » (15, 22)

Jésus est pris au piège de ses propres paroles. Il est vaincu par la foi de cette Cananéenne qui élargit la compréhension que Jésus avait de sa mission. Il découvre la largeur et l’universalité de la foi au-delà de toutes les catégories et religions. C’est l’amour maternel d’une païenne qui lui fait abattre une barrière millénaire.

Une Cananéenne
« Jésus se retira dans la région de Tyr et de Sidon. Voici qu’une Cananéenne venue de ces territoires… » (15, 21) Nous sommes en-dehors d’Israël, au nord, le long de la mer, dans le territoire actuel du Liban, appelé alors Syrophénicie car la Phénicie était intégrée à la province romaine de Syrie. L’évangéliste désigne la femme issue de cette région, non comme une étrangère, une syrophénicienne, mais comme une Cananéenne, terme à connotation religieuse équivalent à païen. En effet, les Juifs considéraient ce peuple comme impossible à intégrer en raison de son syncrétisme religieux et une inimitié ancestrale. Ici, Matthieu « s’adresse à une Église dont certains membres juifs se demandent encore s’il convient d’admettre des « Cananéens » (Syriens) dans leurs rangs. » (Claude TASSIN, L’Évangile de Matthieu, 1991).

Abbé Marcel Villers

CLÉS POUR LIRE MATTHIEU : 40. MARCHER SUR L’EAU

Clés pour lire l’évangile de Matthieu

Dans cette série hebdomadaire, nous voulons fournir des clés pour ouvrir et apprécier l’évangile de Matthieu dont nous suivons la lecture liturgique. Aujourd’hui : Mt 14, 22-33 du 19e dimanche ordinaire.

40. Marcher sur les eaux
Jésus lui dit : « Viens ! » et Pierre marcha sur les eaux. (Mt 14, 29)

« Vers la fin de la nuit, Jésus vient vers eux en marchant sur la mer. » (14, 25) Jésus les rejoint, il est présent, il est vivant, vainqueur à tout jamais de la mort et du mal qu’il écrase en marchant dessus. Mais les disciples ne le reconnaissent pas, car c’est de nuit.

Et voilà qu’au cœur de la nuit, deux consignes résonnent : « Confiance ! C’est moi. N’ayez plus peur. » (14, 27) Le Seigneur n’est pas là-haut dans la montagne et nous sur les eaux agitées de ce siècle. Il est là, à nos côtés.

La peur doit faire place à la foi, la confiance. Comme à Pierre, Jésus nous dit : Viens. Alors, nous pouvons, à notre tour, marcher sur les eaux, vaincre les flots tumultueux et les vents contraires. Telle est la puissance de la foi. Sans elle, nous serions engloutis et disparaitrions dans les flots.

La barque
Dans de nombreuses civilisations, la barque est le symbole de la mort et du passage dans l’au-delà. Elle joue un rôle important dans la religion de l’Égypte antique. De même, dans la mythologie grecque, Charon conduit dans sa barque les âmes des morts vers leur demeure définitive, en traversant le Styx.
Dans la Bible, depuis l’arche de Noé jusqu’à la barque des disciples de Jésus, est symbolisé le véhicule qui permet de passer d’une rive à l’autre, de traverser les tempêtes et les vents violents. La barque est le symbole de l’Église, lieu du salut et du passage dans le Royaume.
L’architecture de nos églises en témoigne par le nom « nef » (du latin navis qui signifie navire) donné à l’espace central d’une église. De plus, dans certaines églises, la voûte rappelle clairement la coque d’un navire retournée.

Abbé Marcel Villers

CLÉS POUR LIRE MATTHIEU : 39. TRANSFIGURÉ

Clés pour lire l’évangile de Matthieu

Dans cette série hebdomadaire, nous voulons fournir des clés pour ouvrir et apprécier le texte de l’évangile de Matthieu. Cette semaine : Mt 17, 1-9 pour la fête de la Transfiguration du Seigneur.

39.Transfiguré sur une haute montagne
De la nuée, vint une voix qui disait : « Écoutez-le ! » (Mt 17, 5)

« Son visage devint brillant comme le soleil et ses vêtements blancs comme la lumière. » (17, 2) D’ordinaire, on peut devenir lumineux si on est éclairé par une puissante lumière extérieure. Ici, la face de Jésus, ses vêtements, l’ensemble de son corps deviennent source de lumière.

« Pierre parlait encore lorsqu’une nuée lumineuse les couvrit de son ombre. » (17, 5) Bien que lumineuse, la nuée les plonge maintenant dans l’ombre ! Elle les prive de la vision, la nuée les terrasse, ils sont rendus aveugles. Et par là même, ils sont maintenant mis en situation pour entendre. De la nuée, en effet, vient une voix : « Écoutez-le ! » (17, 5) Ce n’est pas regarder, voir Jésus qui importe, c’est l’écouter, lui obéir, le suivre en actes.

Transfiguration pascale
Alors que les disciples sont à terre et plongés dans la mort par la peur, Jésus les touche, et leur dit : « Relevez-vous et n’ayez pas peur !»  (17, 7) Ce verbe : se « relever » est celui qui sera utilisé pour parler de Jésus, relevé ou ressuscité d’entre les morts à Pâques. La Transfiguration prépare le cœur des disciples à surmonter le scandale de la croix. Jésus leur avait annoncé qu’il allait être trahi et mis à mort, qu’il toucherait alors le fond de l’humiliation. Maintenant, sur la montagne, il leur montre l’issue : la glorification lumineuse, la métamorphose de la résurrection. Cette transfiguration est ce qui nous attend aussi : « en ce jour, sur le Thabor, le Christ transforma la nature enténébrée d’Adam. L’ayant illuminée, il la divinisa. » (C. ANDRONIKOFF, Le sens des fêtes, 1970

Abbé Marcel Villers