Clés pour lire Jean : 25. Le vrai Berger

Dans cette série hebdomadaire, nous voulons fournir des clés pour ouvrir et apprécier le texte de l’évangile de Jean.
Alleluia ! Il est ressuscité ! Comme le berger, il marche en tête, suivons-le en ce temps pascal :  Jn 10,1-18.


JE SUIS LE VRAI BERGER

Il marche à leur tête, et les brebis le suivent,
car elles connaissent sa voix. (Jn 10,4)

Le Christ a vaincu la mort, il est ressuscité. Et il est le premier d’une multitude. Il n’a qu’un souci : amener tous les humains dans la bergerie, avec la même tendresse que le bon pasteur met à chercher la brebis égarée et la prend sur ses épaules. « Il faut que je les conduise. Elles écouteront ma voix : il y aura un seul troupeau et un seul pasteur. » (10,16)

« Je donne ma vie pour mes brebis. » (10,17) Librement, en connaissance de cause, le Christ donne sa vie. « Nul ne peut me l’enlever : je la donne de moi-même. » (10,18)

La signification de la passion et de la mort de Jésus est ainsi révélée. Jésus n’est pas mort par surprise ; on ne lui a pas pris sa vie ; il l’a donnée, livrée par amour. Car pour lui, les brebis comptent vraiment. Il n’est pas comme le mercenaire qui « s’il voit venir le loup, abandonne les brebis et s’enfuit. » (10,12) Le vrai berger donne sa vie pour ses brebis. Elles sont à lui, non comme on possède des choses, mais comme deux êtres qui s’aiment s’appartiennent.

Le roi-berger
« Le métier de berger est l’un des plus anciens, des plus rudes. Sans cesse en marche, en alerte, le berger doit parcourir de longues distances, connaître les sentiers et les herbes, veiller la nuit, savoir les astres et les vents. Gardien et nourricier, il lui faut mener le troupeau vers de gras pâturages, le protéger des bêtes sauvages, le faire reposer et se désaltérer en des pacages frais et des enclos fermés. Il aime fortifier la brebis chétive, soigner celle qui est malade, panser celle qui est blessée, ramener les brebis qui s’égarent, chercher celles qui sont perdues.
En Orient, les rois étaient nommés pasteurs de leur peuple. Dans la Bible et dans l’histoire, ils sont nombreux les conducteurs d’hommes qui s’initièrent à leur métier en connaissant une à une leurs brebis et en conduisant les troupeaux de longues années durant. Ainsi, les évangiles reconnaissent en Jésus un nouveau David, un Berger messianique. » (Jacques GOETTMANN, Saint Jean, évangile de la Nouvelle Genèse, 1982)

Abbé Marcel Villers

Clés pour lire Jean : 23. Thomas, le croyant

Dans cette série hebdomadaire, nous voulons fournir des clés pour ouvrir et apprécier le texte de l’évangile de Jean. Alleluia ! Il est ressuscité ! En ce temps pascal, renouvelons notre foi avec Thomas :  Jn 20,1-10.


THOMAS, MODELE DE FOI

Jésus vint et il était là au milieu d’eux. (Jn 20,19)

Thomas ne croit pas les autres sur parole. Il se méfie des évidences communes et des illusions collectives. Tous ont beau lui dire : « Nous avons vu le Seigneur » (20,25), Thomas veut se faire une opinion par lui-même, vérifier la matérialité du corps de Jésus, s’assurer que ce n’est pas un fantôme ou le produit d’une vision, être sûr que ce corps est bien celui de Jésus et non d’un quelconque revenant. Sur ce point, Thomas nous est proche.

Deux autres points nous séparent de lui.
D’une part, l’apôtre demande une preuve, non de la divinité de Jésus, mais de son humanité. Il veut toucher le corps terrestre de Jésus, alors que nous, c’est l’extraordinaire, le merveilleux qui nous fascinent.
D’autre part, Thomas a finalement vu ce qu’il voulait voir. Nous ne savons pas s’il a touché, mais il a vu les plaies aux mains et au côté. Cela n’est pas possible pour nous, mais Jésus s’empresse d’ajouter : « Heureux ceux qui croient sans avoir vu » (20,29). La condition du croyant, c’est la non-vision.

Le premier jour de la semaine
Le premier jour de la semaine, pour le Nouveau Testament, est celui de la résurrection de Jésus, celui de la venue du Seigneur. Celle-ci se renouvelle lors du rassemblement liturgique des chrétiens, où la présence du Seigneur est réactualisée par la fraction du pain et l’envoi dans le monde. C’est le Jour du Seigneur, en latin « dies dominicus ».
Pour les Romains, le premier jour de la semaine est associé au soleil, dont on retrouve trace dans le néerlandais Zondag. Chaque jour fêtait une divinité  ; dans l’ordre : Sol, Luna, Mars, Mercurius, Jupiter, Venus et Saturnus, les sept planètes connues à Rome entre le Ier et le IIIe siècles. Ces noms latins sont encore ceux de notre calendrier. Le premier devint jour de repos sous Constantin, en 321 : « Au jour vénérable du soleil, que les magistrats et les habitants se reposent et que tous les ateliers soient fermés ». Du coup, le Jour du Seigneur des chrétiens devint chômé par tous. Du latin ecclésiastique « dies dominicus », le mot « dimanche » est apparu dans le calendrier à l’aube du XIIe s. sous la forme « denenche ». A compter du XIVe siècle, le mot dimanche, écrit « dymanche », prend le son qu’on lui connaît aujourd’hui et, au XVIIe siècle, son orthographe exacte. (D’après Alice DEVELEY, L’histoire secrète des jours de la semaine, 2017)

Abbé Marcel Villers

Clés pour lire Jean : 21. La Passion

Clés pour lire l’évangile de Jean

Dans cette série hebdomadaire, nous voulons fournir des clés pour ouvrir et apprécier le texte de l’évangile de Jean. En ce jour des Rameaux, Jésus entre à Jérusalem pour y souffrir et mourir. Intéressons-nous au récit de la Passion selon saint Jean que nous lisons chaque vendredi saint : Jn 18,1- 19,42.

La Passion du Roi

Ils lèveront les yeux vers celui qu’ils ont transpercé.
(Jn 19,37)

Exalté et glorifié, tel est Jésus mourant sur la croix. Saint Jean opère ainsi une anticipation remarquable : l’exaltation de Jésus, son intronisation royale à la droite de Dieu, a directement lieu à la croix.
L’élévation du Christ en croix est considérée dans une perspective à la fois royale et de salut : du haut de la croix, Jésus attire à lui tous les hommes pour leur donner le salut ; il devient ainsi le roi de tous ceux qui croient en lui.
La croix représente une véritable substitution de pouvoir : le prince de ce monde est jeté dehors et remplacé par le pouvoir royal de Jésus. Même si « Ma royauté n’est pas de ce monde » (18, 36), la croix est pour Jean un trône où Jésus est installé comme Roi-Messie et Seigneur. « Maintenant a lieu le jugement de ce monde ; moi, quand j’aurai été élevé de terre, j’attirerai à moi tous les hommes. » (12, 31-32)

La structure du récit de la Passion selon saint Jean
Le récit de la passion est construit comme une pièce en trois actes avec chaque fois unité de lieu, de temps et d’action.
Le premier acte (18,1-27) : mainmise des Juifs sur Jésus, a lieu dans l’espace juif, de la nuit au chant du coq avec les grands prêtres comme acteurs, directs ou indirects.
Le deuxième acte (18,28-19,15) : le procès devant Pilate, a lieu au palais de Pilate, du point du jour à midi avec comme acteur Pilate, intermédiaire entre les Juifs et Jésus.
Le troisième acte (19,16-42) : la crucifixion, a lieu sur le Golgotha, de l’après-midi au soir avec comme acteurs la communauté, l’Église (Marie, des femmes, le disciple, Joseph, Nicodème).
Chaque acte se déroule en 7 tableaux (3+1+3) qui se correspondent l’un l’autre (1-7 ; 2-6 ; 3-5) avec le 4e comme tableau central, celui qui donne une clé pour saisir le sens de la passion, 18,12-14 : mort pour tous ; 19,1-3, le cœur de l’ensemble : couronnement de Jésus comme roi ; 19,28-30 : Jésus donne l’Esprit et fait naître l’Église.

Abbé Marcel Villers

Clés pour lire Jean : 20. Laver les pieds

Clés pour lire l’évangile de Jean

Dans cette série hebdomadaire, nous voulons fournir des clés pour ouvrir et apprécier le texte de l’évangile de Jean. En ce jeudi-saint, la signification de la mort de Jésus et son testament  nous sont livrés :  Jn 13,1-15.

Le lavement des pieds

Sachant que l’heure était venue pour lui de passer
de ce monde à son Père. (Jn 13,1)

Ce soir-là, Jésus livre l’essentiel de sa vie et le sens de sa mort-résurrection. Son testament tient en deux gestes et une parole.
Le premier geste est celui du repas, de la communion : Jésus donne sa vie, son corps et son sang qui deviennent nourriture, c’est-à-dire, aliment de vie.
Le deuxième geste est celui du lavement des pieds : Jésus se dépouille de son vêtement, de sa vie et s’abaisse aux pieds de ses disciples pour les servir, les sauver.
Ces gestes, Jésus nous demande de les faire en mémoire de lui : « Faites ceci en mémoire de moi. » Il ne s’agit pas de répéter des rites, mais de s’engager à la suite de Jésus à donner notre vie par amour, à communier avec nos frères et sœurs, à nous laver les pieds les uns aux autres. La communion fonde la fraternité, la communauté des disciples.

Un geste d’esclave et de disciple
« Dans le judaïsme ancien, qui lave les pieds et à qui les lave-t-on ? Laver les pieds d’autres personnes peut être considéré sous deux points de vue. Laver les pieds de quelqu’un est une action humiliante qu’on ne peut pas imposer à un esclave israélite. Les Sages disaient : Un esclave hébreu ne doit pas laver les pieds de son maître, ni lui enfiler ses chaussures. Imposer un tel geste à un Israélite serait attentatoire à sa dignité d’homme libéré par Dieu lors de la sortie d’Égypte. En revanche, c’est une action qu’un disciple doit à son maître et qu’une femme accomplit pour son mari car toute espèce de service qu’un esclave doit à son maître, un disciple le doit à son maître. Laver les pieds marque un lien particulier entre celui qui fait le geste et celui qui en bénéficie. Dans le rapport disciple-maître c’est une façon d’honorer le maître. En accomplissant un tel geste, Jésus se met en position d’esclave (le maximum de distance), mais aussi en situation de disciple (une relation), lui qui est le maître. Le geste de Jésus est d’autant plus paradoxal qu’il le fait au cours d’un repas, or, d’ordinaire, laver les pieds se fait lors de l’arrivée dans une maison ou quand le maître quitte la maison d’études. » (Jean-Pierre LÉMONON, Pour lire l’évangile selon saint Jean, 2020)

Abbé Marcel Villers