HOMÉLIES DE L’AVENT THEUX 2025 2e DIMANCHE

HOMÉLIE 2ème dimanche de l’Avent

Theux 2025

La liturgie de ce jour dresse devant nous un étrange personnage.
Il est vêtu de peaux de bêtes, le vêtement sauvage des premiers hommes dans leur corps à corps avec la nature.
« Il portait un vêtement de poils de chameau ; il avait pour nourriture des sauterelles et du miel sauvage. »

Que signifie cette description de Jean Baptiste ?
Une nouvelle humanité est en train de naître. Ce vêtement de bêtes, c’est l’habit des commencements, le costume des origines.
Jean Baptiste invite ainsi à un nouveau commencement, une nouvelle naissance que son baptême symbolise.
Convertissez-vous, car le Royaume des Cieux est tout proche !
Jean annonce un nouveau monde que le prophète Isaïe contemple et décrit avec poésie : « Le loup habitera avec l’agneau,  le veau et le lionceau seront nourris ensemble, un petit garçon les conduira. Le nourrisson s’amusera sur le nid du cobra. Il ne se fera plus rien de mauvais ni de corrompu. »

Bref, un monde à l’envers du nôtre. Un monde où les loups cesseront de dévorer les agneaux et les serpents de tuer les enfants.

Vous me direz, nous en sommes loin. Et puis, que voulez-vous qu’on y fasse ?

Jean Baptiste répond : Lève-toi, il est temps. Le Seigneur vient annoncer aux captifs la délivrance. Mets tes pas dans les siens.

À la suite de Jésus, nombreux sont les chrétiens engagés dans la libération des captifs. Je songe aux Mercédaires, fondés par un jeune catalan, Pierre Nolasque, au XIIe s. A l’époque, en mer Méditerranée, les chrétiens sont capturés et réduits en esclavage par des pirates musulmans qui les échangent contre rançon. Rien de nouveau aujourd’hui !
Le jeune Pierre et quelques compagnons s’organisent pour réunir les sommes demandées ou, si nécessaire, ils prennent la place des otages en attendant une libération. Ils donnaient ainsi leur propre corps pour remplacer les prisonniers, accomplissant à la lettre le commandement : « Nul n’a plus grand amour que celui-ci : déposer sa vie pour ses amis » ( Jn 15, 13).

Ces religieux de la Merci ou Miséricorde inspirent aujourd’hui de nouvelles formes d’action face aux esclavages modernes : la prostitution, le travail forcé, les otages de l’alcool, de la drogue, du sexe.

Ainsi, à Paris, mais il en existe aussi à Liège, une association qui se nomme  « Aux captifs la libération », regroupe des chrétiens qui, deux par deux, parcourent, souvent la nuit, les rues et cherchent le contact amical avec tous ces hommes, femmes et jeunes mineurs, vivant en rue, sans logement, sans papier, otage de l’alcool, de la drogue ou de la prostitution. Ils les accompagnent et les aident à trouver leurs chemins de libération.

Mais que puis-je faire, moi qui vis à Theux ? Ceux qui ne peuvent pas s’engager dans les tournées-rue ou permanences d’accueil peuvent contribuer par la prière. Ces priants, engagés non pas en actes, mais par la prière, sont considérés comme des bénévoles à part entière dans le réseau de prière « Aux captifs la libération », dont vous avez l’adresse sur la deuxième page du carnet de l’Avent.

Lève-toi, il est temps. Le Seigneur vient annoncer aux captifs la délivrance. Mets tes pas dans les siens.

Abbé Marcel Villers

HOMÉLIE DES DIMANCHES D’AVENT Theux 2025

Premier dimanche d’Avent 2025

Est-ce que nous savons attendre ? Et si oui, qu’attendons-nous ?
Que tout continue comme maintenant ou que les choses changent ?
Attendre le Seigneur, c’est veiller, donc agir et non dormir ; c’est faire venir le Royaume dont il a annoncé la venue.

Lève-toi, il est temps. L’heure est venue de sortir de notre torpeur, écrit saint Paul, de notre train-train habituel. Mettons-nous en marche sur les chemins de la justice où le Seigneur nous précède.
Il est le Prince de la Paix ;
le libérateur des captifs ;
l’étranger venu frapper à notre porte ;
l’enfant de Dieu que tous nous sommes.

Ce sont les quatre thèmes que nous méditerons en ce temps d’Avent, autant de réalités de notre aujourd’hui : la guerre, les otages, les migrants rejetés, les enfants abusés ou refusés.

Veillez. Tenez-vous prêts, nous dit l’évangile.
Sortez de votre sommeil, proclame Saint Paul.
Quant au prophète Isaïe, il incite à miser sur la paix : De leurs épées, ils forgeront des socs de charrue, on ne s’entrainera plus pour la guerre.

Cet enjeu est plus actuel que jamais. En 2024, on a dénombré 61 conflits dans le monde, dont 18 guerres : Ukraine, Gaza, Soudan, Congo, etc.

Pouvons-nous rester passifs ?
Non. Lève-toi, il est temps. Ce sera notre mot d’ordre pour ce temps de l’Avent. Mais vous me direz : que voulez-vous que j’y fasse ? comment puis-je, moi seul, changer les choses ?

Cette résignation, ce constat d’impuissance, nous le partageons aisément.  Mais ce n’est pas une fatalité comme le démontre par son action Ella Mindja, jeune catholique congolaise, originaire du Sud-Kivu, pour qui «la guerre est une réalité qui l’accompagne depuis l’enfance».

Depuis près de trente ans, des groupes armés s’affrontent dans l’Est du Congo. Et les femmes paient le prix le plus lourd. Elles sont violées, déplacées, réduites au silence. Mais, dans ce chaos, elles ne sont pas que des victimes. Elles sont surtout et souvent des actrices essentielles de survie. Ce double héritage – la douleur et la résistance – a forgé la vocation d’Ella Mindja : faire du droit une arme pacifique. Elle a choisi les études de droit et est devenue avocate militante. Des villages de Bukavu aux tribunes de l’ONU, Mindja a porté la voix des femmes congolaises, elles qui refusent la résignation.

Pour elle, la paix ne se décrète pas; elle se construit avec celles qui ont survécu. La paix véritable naît de la vie quotidienne, de la survie, de la solidarité. En ce sens, la femme congolaise est la première diplomate de la paix. Car les femmes continuent de croire à la possibilité d’un lendemain. Elles sont veuves, mères, orphelines, mais debout.

Aux jeunes filles congolaises qui grandissent dans la peur, Mindja adresse ce message: «La volonté de Dieu ne nous conduit jamais là où sa grâce ne peut nous soutenir. Vous avez déjà montré une force extraordinaire. C’est à vous maintenant de bâtir, pierre après pierre, le pays que nous voulons». La paix n’est pas un rêve abstrait, mais un travail quotidien, une conversion du regard et des structures;

Et nous, alors ? Que pouvons-nous faire ?. Là où nous sommes, devenir des instruments de paix comme le propose la prière de saint François d’Assise.

Seigneur, fais de moi un instrument de ta paix !
Là où il y a de la haine, que je mette l’amour.
Là où il y a l’offense, que je mette le pardon.
Là où il y a discorde, que je mette l’union.
Là où il y a désespoir, que je mette l’espérance.
Là où il y a les ténèbres, que je mette la lumière.
Là où il y a la tristesse, que je mette la joie.

Abbé Marcel Villers

HOMÉLIE : L’ ASCENSION DU SEIGNEUR THEUX 2025

L’ Ascension du Seigneur

Il se sépara d’eux et fut emporté au ciel.
Jésus est arrivé au terme de sa course. Venu du ciel pour partager la condition humaine, il retourne là d’où il est venu : au ciel. Tout au long de son temps terrestre, il a manifesté l’amour de Dieu pour les petits et les pauvres, les malades et les pécheurs, annonçant ainsi un monde nouveau. Mais « les siens ne l’ont pas reçu » (Jn 1,11), ils l’ont supprimé en le crucifiant, mais Dieu l’a ressuscité le troisième jour.

L’ascension, c’est la victoire de Jésus, il est au ciel, assis à la droite de Dieu. Avec toute son humanité, Jésus est monté au ciel. Il est le Premier. « Je pars vous préparer une place… je reviendrai et je vous emmènerai auprès de moi, afin que là où je suis, vous soyez vous aussi. » (Jn 14, 3) Là où est Jésus, là nous serons. Le ciel est l’avenir de l’homme, le terme et donc le sens de notre existence. On comprend que les apôtres fixaient le ciel où Jésus s’en allait. Ils ont raison de le fixer. Là est l’aboutissement de notre vie. Alors, nous dit saint Paul, « recherchez les réalités d’en haut, , c’est là qu’est le Christ. Pensez aux réalités d’en haut, non à celles de la terre… » (Col 3, 1-3)

L’ascension nous détournerait-elle de la terre et des hommes ? Il est vrai qu’à certaines époques, les chrétiens ont succombé à cette tentation. A force comme les apôtres de fixer le ciel, ils en étaient arrivés à mépriser cette terre et la condition humaine. La vie dans ce monde était vécue comme un temps d’épreuve, une sorte de test pour obtenir le droit d’entrer au ciel, notre véritable destination. La prière du Salve Regina exprime bien cette conception. S’adressant à la Vierge Marie, elle dit : « Vers toi nous élevons nos cris, pauvres enfants d’Ève exilés. Vers toi nous soupirons, gémissant et pleurant dans cette vallée de larmes. »

En contre-point à ce regard exclusif tourné vers le ciel, les anges nous interrogent. Pourquoi restez-vous là à regarder vers le ciel ?
Le départ du Christ est appel à l’engagement en ce monde. La foi n’est pas une fuite ou une démission. Elle ne se satisfait pas de cette terre telle qu’elle est, souvent une sinistre vallée de larmes pour bien des hommes et des femmes. Un autre monde est possible, une autre terre est attendue.

Au cœur de l’histoire, le chrétien avance en boitant, les pieds dans la glaise, et même dans la boue mais tout autant tendu vers Celui qui nous attend au ciel, auprès de Dieu. L’Ascension, loin de nous détourner de la terre et de l’humain, nous y ramène. Elle définit le point stratégique de toute vie chrétienne : tendue entre le désir du ciel et le service des hommes. Car en même temps qu’il « recherche les choses d’en haut » (Col 3,1), le chrétien entend l’appel pressant de ses frères à plus de justice et de dignité.

Le chrétien est condamné à boiter. Il habite ce monde et ses limites, mais il se veut déjà tendu vers le ciel, auprès du Christ. Le chrétien veut les contraires : le ciel et la terre, Dieu et ses frères.
Pourquoi restez-vous là à regarder vers le ciel ?
Sans le ciel, la terre est vide.
Sans la terre, le ciel n’est qu’un rêve.

Abbé Marcel Villers

HOMÉLIE : 4° DIMANCHE DE PÂQUES. ACTION DE GRACES POUR LE PAPE LÉON XIV THEUX

4° Dimanche de Pâques. Jn 10,27-30. Theux 2025
Action de grâce pour le pape Léon XIV

Ce dimanche, nous avons la joie de rendre grâce ensemble pour l’élection du nouveau Pape. Nous prierons pour lui au cours de cette célébration. Que le Seigneur donne au pape Léon XIV la grâce et la force pour assurer le ministère de Pierre dans l’Église. Service de l’unité et de la communion, service de l’humanité dans la charité. Léon XIV se veut serviteur de la paix à la suite du Christ, le Bon Pasteur.

Ce dimanche, journée annuelle des vocations, notre évêque nous demande de prier pour que soit donnés à notre Église des pasteurs, mais aussi des diacres, des catéchistes, des serviteurs de la prière et de l’évangélisation. La pénurie est aujourd’hui un fait ; il reste 4 séminaristes pour toute la partie francophone de notre pays. Nous sortons inéluctablement d’une Église cléricale. C’est bien un des enjeux du pontificat qui s’ouvre : passer à une Église synodale. 

Je suis le Bon Pasteur.  Mes brebis écoutent ma voix.  Moi, je les connais.
Tout se joue dans le rapport intime à Jésus.
Écouter sa voix, c’est ce qui fait le disciple : être à l’écoute, écoute de la parole du maître.
Mes brebis écoutent ma voix. Voilà le secret de l’unité du troupeau : la voix du berger, la parole du Christ, est bien la source de la communion qu’est l’Église.
Pierre le confesse au nom de tous : A qui irions-nous ? Tu as les paroles de la vie éternelle.
Tout se joue dans le rapport à Jésus, non seulement à sa parole, mais à sa personne.
Simon, m’aimes-tu plus que ceux-ci ?  Oui, Seigneur, je t’aime, tu le sais.
Jésus lui dit : Sois le pasteur de mes brebis. (Jn 21,15-16)
Le pape, successeur de Pierre, est d’abord situé dans cette relation d’écoute et d’amour de Jésus où se fonde sa mission.

Cette mission est à la fois interne à l’Église et au service de l’humanité.
Léon XIV veut « une Église synodale », c’est-à-dire une Église où l’on marche ensemble, « une Église qui cherche, qui cherche toujours à être proche, surtout de ceux qui souffrent. »
« Nous devons, dit-il, chercher ensemble comment être une Église missionnaire, une Église qui construit des ponts, qui dialogue toujours et est ouverte pour recevoir tous ceux qui ont besoin de notre charité, de notre présence, de notre dialogue et de notre amour. »
La mission du pape est aussi au bénéfice de l’humanité. « L’humanité a besoin du Christ et de sa lumière ». Les premiers mots de Léon XIV sont clairs : « La paix soit avec vous tous ! C’est la première salutation du Christ ressuscité, le Bon Pasteur qui a donné sa vie pour le troupeau de Dieu. Une paix désarmée et une paix désarmante, humble et persévérante. » Qu’espère d’autre le monde actuel ?

Le nouveau pape se situe en référence à Léon XIII, dont il a pris le nom. Ce dernier a mis en évidence les dangers de la paix armée. En 1894, il soulignait l’incidence sociale des dépenses d’armements et appelait de ses vœux l’institution de la médiation et de l’arbitrage pour prévenir et régler les différents. Nous sommes aujourd’hui dans la même situation.

Comment ne pas penser à Pacem in terris de Jean XXIII ? On est frappé par la similitude des situations et des messages. En 1963, Jean XXIII s’élève contre l’idée que la paix naît de l’équilibre des armements : « La vraie paix, écrit-il, ne peut s’édifier que dans la confiance mutuelle.» Or, « nous voyons régner sur les peuples la loi de la crainte, ce qui conduit à consacrer des sommes énormes aux dépenses militaires. » Les relations entre les peuples doivent être fondées sur l’amour et non la crainte.

C’est pour notre époque que Léon XIV veut être avec nous « témoins joyeux de la Bonne nouvelle de Jésus Sauveur. »
Bonne nouvelle pour tous les peuples, toutes les nations, toutes les cultures : « Ils n’auront plus faim, ils n’auront plus soif, la brûlure du soleil ne les accablera plus  puisque le Christ sera leur Pasteur  pour les conduire vers les sources de vie. Et Dieu essuiera toute larme de leurs yeux. » (Ap 7, 16-17)

Abbé Marcel Villers