Homélie de l’abbé Marcel Villers pour le 20e dimanche ordinaire. Année B. La Reid, Theux 18-19 août 2018
Je suis le Pain vivant descendu du ciel.
Qui mange ma chair et boit mon sang a la vie éternelle.
« La vie éternelle », pas moins. Bien sûr, nous y croyons et nous le professons haut et clair chaque fois que nous proclamons le Credo : « Je crois à la résurrection de la chair, à la vie éternelle ».
Deux questions se posent. Qu’est-ce qu’une vie éternelle ? Comment pouvons-nous accéder à une vie éternelle ?
Qu’est-ce qu’une vie éternelle ?
Il y a quelques années, l’épouse d’un milliardaire anversois fait jurer à son mari qu’il lui offrira pour dernière demeure, une chambre froide, un congélateur où elle sera conservée à une très basse température en attendant qu’on trouve la recette de l’éternité. Après plusieurs refus de la part d’administrations communales, la ville de Gand autorise la construction du fameux tombeau ou chambre frigorifique. La chère épouse y repose pour ce qu’elle imagine être l’éternité.
Ce fait divers authentique (rapporté par G. Ringlet dans La Croix, 18-19 août 2018) est révélateur d’une interrogation de toujours sur l’au-delà de cette vie. La mort est inéluctable, c’est un fait que nul ne peut nier.
Mais la vie ne peut-elle pas l’emporter ?
C’est un fait aussi que toutes les civilisations humaines ont développé la conviction que la vie se poursuit au-delà de la mort. Les tombes dès la préhistoire, celles des premiers temps de l’humanité, témoignent de cette foi en une autre vie. On équipe le défunt du nécessaire pour continuer à vivre dans l’autre monde : vaisselle, monnaie, outils et mobilier.
Mais s’agit-il de vie éternelle ou de survie éternelle ? L’éternité est-elle la prolongation indéfinie de cette vie ? Et surtout, la vie éternelle est-elle seulement à la fin, à la fin de notre existence ? Et si l’éternité se jouait aujourd’hui ? La vie éternelle est-elle une question de durée ou d’intensité de la vie ? Se joue-t-elle au-dehors ou au-dedans de notre vécu ? L’au-delà que nous réservons à la vie éternelle n’est-il pas plutôt un en-dedans ?
Jésus répond clairement. Qui mange ma chair et boit mon sang a la vie éternelle.
C’est au présent, c’est maintenant, ici, aujourd’hui que cela se réalise. Qui mange ma chair et boit mon sang a la vie éternelle, et moi je le ressusciterai au dernier jour. Cela veut dire simplement qu’en mangeant la chair et en buvant le sang du Christ ressuscité, nos corps eux-mêmes participent à sa condition de ressuscité, portant en eux les germes de la résurrection.
C’est énorme et incroyable à vue de nez. En reliant le pain vivant et l’au-delà, l’évangile nous enseigne que la vie éternelle n’est pas une affaire de prolongation. C’est dès aujourd’hui, l’éternité. On n’enferme pas l’éternité dans une chambre froide, ni dans un demain hypothétique. On n’emprisonne pas la résurrection dans un tombeau.
Je suis le Pain vivant descendu du ciel. Qui mange ma chair et boit mon sang a la vie éternelle.
Comment cela peut-il se faire ? Rien d’autre que tendre la main et recevoir, dans la foi, le don de Dieu. Car Dieu a tant aimé le monde qu’il lui a donné son Fils unique. C’est lui qui nous est donné, c’est lui que nous recevons lorsque nous communions. Avec lui, c’est la vie divine, la vie éternelle qui nous est offerte.
Tel est le pain qui descend du ciel : il n’est pas comme celui que vos pères ont mangé. Eux, ils sont morts ; celui qui mange ce pain vivra éternellement.
Abbé Marcel Villers