Clés pour lire l’évangile de Matthieu : 29. Pas de souci.

Dans cette série hebdomadaire (parution le mercredi matin), nous voulons fournir, cette année, des clés pour ouvrir et apprécier l’évangile de Matthieu. Comme la liturgie s’éloigne de la lecture de Matthieu jusqu’à la mi-juin, nous reprenons la lecture continue de l’évangile de Matthieu. Aujourd’hui : Mt 6, 25-34.

29. Pas de souci

Votre Père céleste sait de quoi vous avez besoin. (Mt 6,32)

A chaque jour suffit sa peine. Ne vous mettez pas en souci ! Ne vous inquiétez pas !Ces paroles de Jésus nous semble venir d’un autre monde, d’un autre âge. L’homme d’aujourd’hui, en effet, est un être de souci. Quel est celui qui ne se soucie de rien ? Que ce soit pour sa santé, son confort, son argent, son avenir, chacun est soucieux.
Et pourtant, qui d’entre nous, à force de soucis, peut ajouter un seul jour à sa vie ? Ce serait plutôt le contraire. A force de soucis, c’est à abréger notre vie que nous travaillons.
En fait, le souci est révélateur de ce qui constitue notre vision de l’existence. Autrement dit : de qui dépend notre vie ? D’un Dieu, Père et ami des hommes, ou de notre souci ?
Le contraire du souci n’est pas l’insouciance, mais la foi, la confiance. Le souci, c’est la dépendance, le stress, l’esclavage. Faire confiance à un autre que soi, voilà la liberté. Car « Votre Père céleste sait de quoi vous avez besoin » (Mt 6,32).

Une spiritualité de l’abandon

« Nous ne nous tenons jamais au temps présent », écrivait Pascal il y a déjà plus de trois siècles. Préoccupés que nous sommes par ce qui a été ou sera peut-être, nous finissons par être absents du temps qui est le nôtre. Mais alors, où sommes-nous en réalité ? Quelle est cette vie inquiète d’elle-même et rongée par le souci ? Il faut revenir au moment présent et s’y abandonner dans la confiance. A chaque jour suffit sa peine. « La grâce de l’abandon passe par l’oubli de soi, une forme de consentement à ne pas ruminer notre passé, fût-ce pour en déplorer les manques et pleurer sur nos péchés et sur nous-mêmes, à ne pas imaginer l’avenir, fût-ce pour rêver à un projet de sainteté, mais à nous abandonner à l’amour présent qui nous enveloppe et ne nous manquera pas, pour nous en remettre à lui. » (Marie-Thérèse ABGRALL)

Abbé Marcel Villers

Clés pour lire l’évangile de Matthieu 19. En croix, des cris

Dans cette série hebdomadaire (parution le mercredi matin), nous voulons fournir des clés pour ouvrir et apprécier le texte de l’évangile de Matthieu. Cette semaine : Mt 26, 1- 27, 66 du dimanche des Rameaux et de la Passion.

19. En croix, des cris

Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? (Mt 27, 46)

Trois grands cris sont poussés au Calvaire, ils sont autant de clés pour saisir la dimension rédemptrice de la mort de Jésus.

Le cri de Jésus n’est pas un cri de désespoir, ni de terreur. C’est un cri de confiance du Fils à l’adresse de son Père. Par deux fois, Jésus crie d’une voix forte. La première fois, un appel au secours : « Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? » (27,46) La seconde fois, « dans un grand cri, il rendit l’esprit » (27, 50). Rendre, c’est-à-dire, remettre en toute confiance sa vie, son sort entre les mains de Dieu. Cri de foi du Fils qui remet tout à son Père.

Aussitôt, comme un effet de la mort de Jésus, toute la création s’ébranle et fait entendre sa clameur, son cri. « La terre trembla. Les rochers se fendirent. Les tombeaux s’ouvrirent. De nombreux saints ressuscitèrent et entrèrent dans la ville » (27, 51-53). Une vie d’au-delà envahit la terre, un monde nouveau est déjà là.

Le cri du centurion vient conclure : « Vraiment, celui-ci était Fils de Dieu. » (27, 54) De sa bouche jaillit la plus belle profession de foi.

Récit de la passion

Il paraît vraisemblable que le récit de la passion soit la reprise d’un récit ancien utilisé par les premiers chrétiens pour faire mémoire de la passion et de la mort de Celui qui fonde leur foi. Ce récit est le noyau primitif des évangiles.

Ce récit ne se contente pas de rapporter des faits bruts, les évangélistes s’attachent surtout à leur signification pour la foi et la vie chrétiennes. Matthieu émaille ainsi son récit de nombreuses citations et références à l’Ancien Testament. Il s’adresse, en effet, à des chrétiens pour la plupart d’origine juive, attachés aux Écritures hébraïques. Matthieu leur montre un Jésus qui sait ce qui l’attend, qui s’y soumet librement, car il accomplit ainsi les Écritures. La croix, de scandale absolu, devient la source du salut.

Abbé Marcel Villers