Clés pour lire l’évangile de Matthieu : 48. le denier

Dans cette série hebdomadaire, nous voulons fournir des clés pour ouvrir et apprécier l’évangile de Matthieu dont nous suivons la lecture liturgique. Aujourd’hui : Mt 22, 15-21 du 29e dimanche ordinaire.

48. Le denier de César

« Cette effigie et cette inscription, de qui sont-elles ? » (Mt 22,20)

Jésus est à Jérusalem, on cherche à le piéger, le prendre en faute. La Passion se profile. « Est-il permis de payer l’impôt à César ? » (22,17) Si Jésus répond oui, il se coupe des masses qui ne supportent pas l’oppression des Romains ; s’il répond non, alors il fournit lui-même le motif pour le dénoncer auprès de l’autorité occupante. Le piège est dans le oui ou non. Jésus le déjoue en introduisant un troisième terme : Dieu.

« Rendez à César ce qui est à César », autrement dit la monnaie de sa pièce, rendez-lui son argent. Réponse ambigüe : payer l’impôt ou se débarrasser de toute monnaie romaine ?

« Rendez à Dieu ce qui est à Dieu », c’est-à-dire tout et surtout le culte qui lui est dû car il est le seul digne d’être adoré. Voilà qui sonnait juste aux destinataires de l’évangile de Matthieu qui connaissaient la persécution parce qu’ils refusaient de rendre un culte à César.

Une pièce d’un denier

« Montrez-moi la monnaie de l’impôt. Ils lui présentèrent une pièce d’un denier. » (22, 19) « A l’époque de Jésus, l’unité monétaire de base était le denier d’argent. Pour les besoins quotidiens, on se servait de pièces de cuivre, dont le sesterce qui valait un quart du denier. L’impôt le plus impopulaire était celui sur la personne ou capitation (tributum capitis). Il représentait environ un jour de salaire d’ouvrier : un denier romain par tête. « Cette effigie et cette inscription, de qui sont-elles ? » (22, 20) De nombreux deniers frappés par les empereurs Auguste et Tibère portaient leur effigie. Comme l’une des pièces frappées par Tibère était particulièrement répandue à l’époque, il est possible qu’elle ait été identique à celle montrée à Jésus. » (A. MILLARD, Trésors des temps évangéliques, 1990)

Abbé Marcel Villers

Clés pour lire l’évangile de Luc 46. L’habileté

Dans cette série hebdomadaire, nous voulons fournir des clés pour ouvrir et apprécier le texte de l’évangile. Cette semaine, Lc 16, 1-13 du 25e dimanche ordinaire.

46. L’habileté

           Faites-vous des amis avec l’argent malhonnête. (Lc 16, 9)

Comme le gérant de la parabole, nous disposons de biens qui vont bientôt nous être retirés. Que font les fils de ce monde dans cette situation ? Ils se dépêchent de se faire des amis grâce aux biens qu’ils gèrent. « Les fils de ce monde sont plus habiles entre eux que les fils de la lumière. » (16, 8)

Les biens matériels, l’argent ne sont pas nos maîtres, mais nos serviteurs. Ils doivent servir à se faire des amis. « Le jour où il (l’argent) ne sera plus là, ces amis vous accueilleront dans les demeures éternelles. » (16, 9) Du bon usage de l’argent, Jésus nous donne le critère : l’amitié qu’il nous aura gagné.

Dieu ou Mamon

« Vous ne pouvez pas servir Dieu et l’argent. » (16, 13) On a traduit par « l’argent » le terme utilisé par Luc : « mamon ». C’est un mot araméen désignant la richesse qui a passé dans le talmud et qui avait un équivalent en phénicien. Le Talmud connaît même et emploie couramment l’expression évangélique mamon d’iniquité ou de mensonge, mamon d’impiété. Ces expressions « iniquité, mensonge, impiété » sont traduites moins heureusement aujourd’hui par « malhonnête » (16, 9.11). Luc va plus loin encore dans le rejet de l’argent en l’élevant au rang de fausse divinité ou d’idole, qui s’égale à Dieu, comme Moloch ou Baal : « Vous ne pouvez pas servir Dieu et l’argent. » (16, 13)

Abbé Marcel Villers

Clés pour lire l’évangile de Luc. 38. L’insensé

Clés pour lire l’évangile de Luc

Dans cette série hebdomadaire, nous voulons fournir des clés pour ouvrir et apprécier le texte de l’évangile. Cette semaine, Lc 12, 13-21 du 18e dimanche ordinaire.

38. L’insensé

La vie de quelqu’un, même dans l’abondance,
ne dépend pas de ce qu’il possède. (Lc 12,15)

« Tu es fou », nous crie Dieu. La mort t’attend. Alors « ce que tu auras accumulé, qui l’aura ? » (12, 20) Jésus ne brandit pas la mort comme un épouvantail. Il rappelle avec réalisme que le sens de la vie, le secret du bonheur est ailleurs. Même si l’argent peut y contribuer, « la vie de l’homme ne dépend pas de ce qu’il possède ».

La sagesse que propose Jésus, c’est l’appréciation correcte de la fragilité, de l’éphémère de notre vie. Comme le dit l’Ecclésiaste, « que reste-t-il à l’homme de toute la peine et de tous les calculs pour lesquels il se fatigue sous le soleil ? » Pourquoi passer notre temps, si court, à faire des réserves pour demain ? C’est aujourd’hui qu’il faut vivre et que nos richesses doivent porter du fruit pour nos frères.

Le chrétien et la richesse

« La richesse est tentation chaque fois que l’espoir mis en elle devient concurrent de ce l’on ne peut recevoir que de Dieu, en particulier l’assurance, la sécurité. L’abondance matérielle, en particulier, est propre à éveiller en l’homme l’idée de pouvoir se passer de Dieu. La tentation qui frappe à la porte de l’homme qui est dans l’abondance, c’est d’ignorer qui est l’Eternel, de se satisfaire de ce qu’il possède et de ne plus voir ce que Dieu vient faire dans sa vie, c’est de s’emparer de ce que Dieu donne et d’en faire sa chose, au lieu de rendre grâce et de rendre gloire. Ce qui séduit l’homme au travers de l’argent, c’est l’ambition de l’indépendance, l’idée d’une forme de sécurité autarcique, la pensée de l’autonomie vis-à-vis de Dieu. » (Michel JOHNER, Le chrétien à l’épreuve de l’argent, 2001)

Abbé Marcel Villers