Histoire des missions : 17. La SAM

La S.A.M. ou Société des auxiliaires des missions

Le Père Lebbe (1877-1940), missionnaire belge de la congrégation des Lazaristes, est envoyé en Chine en 1901. Il y devient rapidement le promoteur d’une Église authentiquement chinoise, ce qui provoque de violentes oppositions. Sa congrégation le renvoie en Europe pour apaiser les choses.

« Quand il arrive en Europe en 1920, Vincent Lebbe est habité par cette idée d’une hiérarchie chinoise pour une Église véritablement chinoise. Pour y parvenir, il pense à deux choses : donner une formation solide dans divers domaines aux étudiants chinois présents en Europe pour qu’à leur retour en Chine, ils puissent prendre en main leur pays et leur Église. D’autre part, former des prêtres occidentaux qui se mettraient au service des évêques autochtones au cas où Rome en ordonnerait quelques-uns. » Pendant son séjour forcé en Europe, le Père Lebbe s’occupe des étudiants chinois. Lors d’une conférence à Verviers, en 1922, il fait la connaissance de l’abbé André Boland qui accepte de se charger des étudiants chinois de Belgique. Rapidement, il accueille des jeunes chinois à la paroisse Sainte-Julienne et les met en contact avec le groupe de jeunes verviétois qu’il anime depuis des années.

Le 28 octobre 1926, Pie XI ordonne six évêques chinois dont le premier soin est de chercher un prêtre séculier européen qui accepterait d’être à leur service et incardiné dans leur diocèse. Ils obtiennent de l’évêque de Liège que l’abbé Boland soit mis à la disposition de leur projet. Ainsi va naître progressivement ce qui deviendra la SAM.

Au début, on parle des « Prêtres Auxiliaires des Missions » et les premiers candidats sont recrutés dès 1927. Trois ans après, le premier prêtre part pour la Chine. A partir de 1930, le premier objectif : servir les évêques chinois, s’élargit et devient servir tout évêque autochtone de quelque pays que ce soit. Le 1er juin 1939 à Banneux, la Société des Auxiliaires des Missions (S.A.M.) et la Société des Auxiliaires Laïques des Missions (S.A.L.M) sont reconnues officiellement par Mgr Kerkhofs. « Cette nouvelle manière de concevoir le statut du missionnaire comme auxiliaire qui refuse toute dignité ecclésiastique et qui est totalement donné à l’évêque autochtone en tant que prêtre diocésain au même titre que tous les autres prêtres autochtones, est très novatrice pour l’époque. »

En 1982, les membres de l’Assemblée générale de la S.A.M. décident que la Société a rempli sa mission et n’a plus de raison spécifique d’exister. La SAM a formé 118 prêtres qui ont servi dans plus de 30 diocèses en Asie ou en Afrique.

Abbé Marcel Villers

Sur tout ceci, voir Gabriel BANYANGIRA RUSAGARA, La Société des Auxiliaires des Missions (SAM), de 1926 à 1940. Des prêtres occidentaux au service des évêques autochtones (chinois), Louvain, 2020.

HISTOIRE DES MISSIONS. 7. Adaptation aux cultures (XVIIe s.)

7. La mission, rencontre des cultures (XVIIe s.)

La deuxième stratégie des missionnaires fut celle de l’adaptation. La rencontre et les échanges entre groupes sociaux et cultures différentes entraînent inévitablement métissage et changements culturels : on s’adapte à l’autre. Cela vaut dans les deux sens : le missionnaire, issu du monde latin et européen, va adapter son discours et son action au contexte social comme à la langue des populations. L’accommodation à la religion et à la culture de ces peuples va conduire à certaines formes de cohabitation ou de « baptême » des rites, fêtes et croyances locales au risque du syncrétisme. On adopte dans la liturgie certains gestes et rites significatifs de la culture locale. Et surtout, on apprend et utilise les langues indigènes. On traduit la Bible et le catéchisme. Parmi les premiers missionnaires du Mexique, Pierre de Gand, (Idegem 1480-Mexico 1572), frère franciscain flamand, étudie la langue des Aztèques et compose un catéchisme illustré sous forme de dessins coloriés.

Les Jésuites furent les plus audacieux dans la mise en œuvre de cette stratégie de l’adaptation. N. Standaert a mis en évidence quatre lignes de force de l’action missionnaire menée par les Jésuites au XVIIe siècle : « la politique d’accommodation ou d’adaptation, l’évangélisation à partir d’en haut, la propagation des sciences et techniques occidentales, l’ouverture et la tolérance à l’égard des autres cultures. » (Le Face-à-face des Dieux, Piconrue, 2007, p. 111)

François Xavier inaugura cette nouvelle forme d’action missionnaire par son approche sympathique et admirative de la culture du Japon où il passa trois ans (1549-1551). Roberto de Nobili (1577-1656), jésuite italien, vécut en Inde en adoptant l’habit et les coutumes des moines hindous. Matteo Ricci (1552-1610), jésuite italien, est le représentant le plus connu de cette méthode de l’adaptation qu’il pratiqua en Chine. Adoptant l’habit des lettrés, maîtrisant la langue et la littérature classique chinoises, il présente le christianisme dans les catégories mentales chinoises. Il est présent à la cour de l’empereur où il se distingue par sa science et sa maîtrise des techniques de l’horlogerie, de la cartographie et de l’astronomie. Le plus remarquable, c’est son argumentation rationnelle et non dogmatique, pour persuader les Chinois de la vérité du christianisme. Il approcha ainsi la forme ultime de la rencontre des cultures : le dialogue.

Abbé Marcel Villers