Clés pour lire Jean : 21. La Passion

Clés pour lire l’évangile de Jean

Dans cette série hebdomadaire, nous voulons fournir des clés pour ouvrir et apprécier le texte de l’évangile de Jean. En ce jour des Rameaux, Jésus entre à Jérusalem pour y souffrir et mourir. Intéressons-nous au récit de la Passion selon saint Jean que nous lisons chaque vendredi saint : Jn 18,1- 19,42.

La Passion du Roi

Ils lèveront les yeux vers celui qu’ils ont transpercé.
(Jn 19,37)

Exalté et glorifié, tel est Jésus mourant sur la croix. Saint Jean opère ainsi une anticipation remarquable : l’exaltation de Jésus, son intronisation royale à la droite de Dieu, a directement lieu à la croix.
L’élévation du Christ en croix est considérée dans une perspective à la fois royale et de salut : du haut de la croix, Jésus attire à lui tous les hommes pour leur donner le salut ; il devient ainsi le roi de tous ceux qui croient en lui.
La croix représente une véritable substitution de pouvoir : le prince de ce monde est jeté dehors et remplacé par le pouvoir royal de Jésus. Même si « Ma royauté n’est pas de ce monde » (18, 36), la croix est pour Jean un trône où Jésus est installé comme Roi-Messie et Seigneur. « Maintenant a lieu le jugement de ce monde ; moi, quand j’aurai été élevé de terre, j’attirerai à moi tous les hommes. » (12, 31-32)

La structure du récit de la Passion selon saint Jean
Le récit de la passion est construit comme une pièce en trois actes avec chaque fois unité de lieu, de temps et d’action.
Le premier acte (18,1-27) : mainmise des Juifs sur Jésus, a lieu dans l’espace juif, de la nuit au chant du coq avec les grands prêtres comme acteurs, directs ou indirects.
Le deuxième acte (18,28-19,15) : le procès devant Pilate, a lieu au palais de Pilate, du point du jour à midi avec comme acteur Pilate, intermédiaire entre les Juifs et Jésus.
Le troisième acte (19,16-42) : la crucifixion, a lieu sur le Golgotha, de l’après-midi au soir avec comme acteurs la communauté, l’Église (Marie, des femmes, le disciple, Joseph, Nicodème).
Chaque acte se déroule en 7 tableaux (3+1+3) qui se correspondent l’un l’autre (1-7 ; 2-6 ; 3-5) avec le 4e comme tableau central, celui qui donne une clé pour saisir le sens de la passion, 18,12-14 : mort pour tous ; 19,1-3, le cœur de l’ensemble : couronnement de Jésus comme roi ; 19,28-30 : Jésus donne l’Esprit et fait naître l’Église.

Abbé Marcel Villers

Clés pour lire l’évangile de Jean : 17. L’élévation

Dans cette série hebdomadaire, nous voulons fournir des clés pour ouvrir et apprécier le texte de l’évangile de Jean. Au coeur du carême, le sens de la passion et de la mort de Jésus nous est annoncé : Dieu a donné son Fils unique. Nous lisons Jn 3, 14-21.

17. L’élévation du Fils

La lumière est venue dans le monde et les hommes ont préféré les ténèbres. (Jn 3,19)

Crucifié par la haine, le Christ en croix révèle le sort que l’homme réserve à l’homme. La croix signe l’échec de l’amour et le triomphe de la haine. « Quand la lumière est venue dans le monde, les hommes ont préféré les ténèbres » (3,19). Et pourtant. Au regard de la foi, la croix du Christ révèle l’amour fou de Dieu pour ce monde tel qu’il est : « Dieu a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils unique » (3,16). Ce n’est pas pour juger ce monde de ténèbres et de haine que Dieu a envoyé son Fils, mais pour le sauver (3,17).

La croix est le grand signe dressé par Dieu au cœur de l’histoire et que tout homme est invité à regarder car il révèle à la fois l’étendue du mal dont nous sommes les acteurs et le grand amour dont Dieu nous aime. L’un et l’autre. Car l’un ne va pas sans l’autre : c’est au cœur des ténèbres que peut briller la lumière. Ainsi plus nous contemplons la croix du Christ, plus nous découvrons l’immensité de notre péché et plus nous est révélée l’infinie richesse de la miséricorde divine.

Le serpent de bronze élevé par Moïse

« La nouveauté que Jésus apporte a besoin d’être accomplissement des Écritures. Le serpent élevé dans le désert (Nombres 21,4-9) arrachait à la mort les Hébreux infidèles. La mort qui menaçait le peuple tenait à son incroyance, mais celui qui regardait le serpent de bronze élevé par Moïse était sauvé de la morsure du serpent. Le rite sauvait non de façon magique, mais par la foi en Dieu. « En effet quiconque se retournait vers le serpent était sauvé non par l’objet regardé, mais par toi, le sauveur du monde » (Sagesse 16,7) La référence à l’épisode du serpent rattache la venue de Jésus aux événements de l’Exode et fait de Jésus le nouveau Moïse. » (Alain MARCHADOUR, L’Évangile de Jean, 1992)

Abbé Marcel Villers