SOURCES : 11. La résurrection de la chair

La résurrection de la chair

Corps et âme, tout entier, l’être humain est à l’image de Dieu. Le corps, lui aussi, exprime la personne.
« Est-ce l’âme, comme telle, qui constitue l’homme ? Non. Elle n’est que l’âme de l’homme. Est-ce le corps, alors, qu’on appelle l’homme ? Non, il n’est que le corps de l’homme. Dès lors, c’est l’unité formée de l’union des deux qui seule mérite le nom d’homme. Et certes, c’est l’homme entier que Dieu a appelé à la vie et à la résurrection, et non une partie de l’homme.» (Justin, Fragment 8 )

La résurrection de la chair nous est promise. L’attestent la résurrection de Jésus et son ascension qui fait entrer en Dieu même la chair de ce monde.
« Si la résurrection ne devait être que spirituelle, le Christ aurait dû, lors de sa propre résurrection, montrer son corps gisant d’un côté et, de l’autre, son âme telle qu’elle est. Mais il n’a rien fait de tel, il est ressuscité avec son corps, convaincu que la promesse de la vie concernait aussi celui-ci. » (Justin, Fragment 9 )

Si la résurrection est celle des corps, elle concerne aussi le cosmos tout entier qui est comme le corps de l’humanité. Les énergies du cosmos traversent de façon continue le corps des hommes. En retour, les puissances de résurrection, déjà à l’œuvre dans les corps, travaillent le cosmos.
« Nous le savons, toute la création jusqu’à ce jour gémit en travail d’enfantement. Et non pas elle seule : nous-mêmes qui possédons les prémices de l’Esprit, nous gémissons nous aussi intérieurement dans l’attente de la rédemption de notre corps. Car notre salut est objet d’espérance ; et voir ce qu’on espère, ce n’est plus l’espérer. Ce qu’on voit, comment pourrait-on l’espérer encore ? Mais espérer ce que nous ne voyons pas, c’est l’attendre avec constance.» (Ro 8,22-25)

Abbé Marcel Villers


Saint Justin, le plus important des apologistes du IIe siècle. Né en Palestine, à Naplouse, mais d’origine latine, sa famille étant des colons aisés. Il écrit en grec et enseigne la philosophie, celle du Christ. Il fonde à Rome une école de sagesse chrétienne. Jaloux de son succès, un philosophe concurrent le dénonce comme chrétien. Il est arrêté et exécuté vers 165 avec six de ses élèves. On possède de lui deux apologies adressées à l’empereur Antonin et un dialogue avec un sage rabbin, Tryphon.

Histoire des missions : 23. Vatican II

23. Vatican II et l’activité missionnaire

C’est la première fois qu’un concile traite de l’activité missionnaire de l’Église ; le décret Ad gentes est promulgué, lors de la dernière session, le 7 décembre 1965. Ce texte a donné une nouvelle orientation à la mission. Il rappelle que l’Église est missionnaire de par sa nature elle-même. La mission est ainsi l’épiphanie, la manifestation du projet de Dieu. « Pour affermir la paix, autrement dit la communion avec lui, et pour établir la fraternité entre les hommes, Dieu décida d’entrer dans l’histoire humaine en envoyant son Fils dans notre chair. » (Ad gentes, n°3) Il ne s’agit plus d’imaginer la mission comme une conquête ou une opération d’expansion de l’Église de sorte qu’un jour, l’Église cesserait d’être missionnaire quand toute l’humanité l’aura rejointe. Pour le concile, une Église qui cesserait d’être missionnaire cesserait d’être l’Église de Jésus-Christ. C’est la fin de l’ère des missions au profit de celle de la mission.

La responsabilité missionnaire devient celle de tous les fidèles, celle de partager avec tous le don de Dieu et de permettre à tous les peuples d’accueillir son Règne. Néanmoins, des hommes et des femmes restent chargés d’un ministère qui est celui de toute l’Église : « marqués d’une vocation spéciale, doués d’un caractère naturel adapté, prêts à assumer l’œuvre missionnaire, ils partent dans la foi et l’obéissance vers ceux qui sont loin du Christ. » (Ad gentes, n°23) Le missionnaire ne part pas nécessairement dans un pays lointain ; il est envoyé au plus près des plus loin, d’ici et de partout. Du géographique, on passe au relationnel.

Plusieurs documents ultérieurs vont compléter ces perspectives, dans deux directions : la théologie du salut et le respect des religions. En 1967, Populorum progressio de Paul VI met en évidence la dimension libératrice de l’Évangile qui sera élaborée et mise en œuvre surtout par les épiscopats latino-américains : le combat pour la justice et la participation à la transformation du monde sont des dimensions constitutives de la mission de l’Église. L’ouverture aux diverses religions amène à les considérer non plus comme des rivales mais des compagnes de route. L’évangélisation se fait dialogue car l’Esprit est à l’œuvre à chaque époque et partout dans le monde, donc aussi dans les autres religions et leurs fidèles : « sa présence et son action ne concerne pas seulement les individus, mais la société et l’histoire, les peuples, les cultures, les religions », écrit Jean-Paul II dans Redemptoris missio (1990).

Abbé Marcel Villers

Clés pour lire l’évangile de Jean : 17. L’élévation

Dans cette série hebdomadaire, nous voulons fournir des clés pour ouvrir et apprécier le texte de l’évangile de Jean. Au coeur du carême, le sens de la passion et de la mort de Jésus nous est annoncé : Dieu a donné son Fils unique. Nous lisons Jn 3, 14-21.

17. L’élévation du Fils

La lumière est venue dans le monde et les hommes ont préféré les ténèbres. (Jn 3,19)

Crucifié par la haine, le Christ en croix révèle le sort que l’homme réserve à l’homme. La croix signe l’échec de l’amour et le triomphe de la haine. « Quand la lumière est venue dans le monde, les hommes ont préféré les ténèbres » (3,19). Et pourtant. Au regard de la foi, la croix du Christ révèle l’amour fou de Dieu pour ce monde tel qu’il est : « Dieu a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils unique » (3,16). Ce n’est pas pour juger ce monde de ténèbres et de haine que Dieu a envoyé son Fils, mais pour le sauver (3,17).

La croix est le grand signe dressé par Dieu au cœur de l’histoire et que tout homme est invité à regarder car il révèle à la fois l’étendue du mal dont nous sommes les acteurs et le grand amour dont Dieu nous aime. L’un et l’autre. Car l’un ne va pas sans l’autre : c’est au cœur des ténèbres que peut briller la lumière. Ainsi plus nous contemplons la croix du Christ, plus nous découvrons l’immensité de notre péché et plus nous est révélée l’infinie richesse de la miséricorde divine.

Le serpent de bronze élevé par Moïse

« La nouveauté que Jésus apporte a besoin d’être accomplissement des Écritures. Le serpent élevé dans le désert (Nombres 21,4-9) arrachait à la mort les Hébreux infidèles. La mort qui menaçait le peuple tenait à son incroyance, mais celui qui regardait le serpent de bronze élevé par Moïse était sauvé de la morsure du serpent. Le rite sauvait non de façon magique, mais par la foi en Dieu. « En effet quiconque se retournait vers le serpent était sauvé non par l’objet regardé, mais par toi, le sauveur du monde » (Sagesse 16,7) La référence à l’épisode du serpent rattache la venue de Jésus aux événements de l’Exode et fait de Jésus le nouveau Moïse. » (Alain MARCHADOUR, L’Évangile de Jean, 1992)

Abbé Marcel Villers

21e dimanche ordinaire Lc 13, 22-30 La porte étroite de la liberté

 


Seigneur, n’y aura-t-il que peu de gens à être sauvés ?
Autrement dit, qui entrera dans le Royaume, qui sera sauvé ? Cette interrogation curieuse ou angoissée en cache une autre : serai-je du nombre et comment en être sûr ?
Voilà un souci de moins en moins partagé aujourd’hui. Qui cherche à savoir s’il sera au nombre des élus ?Qui se pose encore la question du salut alors que nous avons atteint un niveau de vie qui nous met à l’abri de bien des soucis ? De quoi devrions-nous être sauvés ?

Et pourtant !
Nombreuses sont les sectes où, comme les Témoins de Jéhova, on va deux à deux proclamer que la fin du monde est proche et qu’il faut se convertir pour être sauvés. Il y a surtout aujourd’hui les mouvements écologistes qui eux aussi annoncent la fin de la planète et demandent la conversion de nos comportements pour sauver la terre. Nouvelle résurgence de la peur de la fin du monde, que nous trouvons déjà chez les prophètes, comme chez les premiers chrétiens. Pour eux, nous sommes dans les derniers temps avant la venue du Royaume. Qui pourra y entrer, échapper à la catastrophe, au jugement ?Bref, qui sera sauvé ?

La réponse de Jésus est surprenante : Efforcez-vous d’entrer par la porte étroite.
Pour lui, le salut ressemble à un fabuleux festin préparé dans une grande salle de fête. Il y a place pour tout le monde. On viendra de l’Orient et de l’Occident, du nord et du midi, prendre place au festin dans le Royaume de Dieu.
Ouverte à tous, la porte de cette salle est cependant étroite, très étroite. Et on se bouscule pour entrer et participer à la fête. Seul celui qui est décidé à se battre parviendra à passer la porte. Ne parviendra à entrer que celui qui est décidé à lutter. Le salut est œuvre de l’homme, comme de la grâce de Dieu. Le festin nous est offert par Dieu. Mais y entrer est notre combat. Il n’y a pas de places réservées. La porte est ouverte à tous, mais pour accéder au festin, il faut y mettre le prix. Il faut passer la porte étroite.

C’est quoi cette porte étroite qui mène l’homme au salut ? La porte étroite, c’est celle de la liberté.
Jésus est cet homme libre qui a rendu libres les êtres humains en leur révélant un Dieu d’amour. Il nous a libérés de la peur, peur d’un Dieu juge implacable. Il nous a libérés de toutes ces images d’un Dieu tout-puissant demandant notre soumission, d’un Dieu culpabilisant écrasant l’homme sous le poids du péché. Dieu est bonté, miséricorde, cherchant le bonheur de l’homme. Le salut, c’est la libération, la naissance d’un être libre, libre d’aimer et d’être soi.

Cela suppose un travail sur soi, une conversion de nos images de Dieu et de nous-mêmes, une conversion de nos pratiques. Comme quoi, être libre est le fruit d’un véritable combat. Jésus nous en a montré le coût : il a dû passer par la porte étroite de l’humilité, de l’abaissement, du don de soi, bref par la croix.
Efforcez-vous d’entrer par la porte étroite.
Il est temps. Bientôt la porte sera fermée. « Qu’attendez-vous ? », nous lance Jésus. Ce n’est pas plus tard qu’il faut décider. C’est ici et maintenant que nous devons choisir, opter en faveur de Jésus et de son chemin de liberté et de vie. Mais, direz-vous, « c’est fait puisque nous sommes ici. » Ne croyons surtout pas qu’appartenir à l’Église fait de nous des élus et nous dispense du combat spirituel. Inutile, comme les exclus, d’argumenter : Nous avons mangé et bu avec toi. Comme nous le faisons à chaque eucharistie.

Cela ne suffit pas : Efforcez-vous d’entrer par la porte étroite.

Abbé Marcel Villers