Clés pour lire Matthieu : 7. Baptême de Jésus

Clés pour lire l’évangile de Matthieu

Dans cette série hebdomadaire, nous voulons cette année fournir des clés pour ouvrir et apprécier le texte de l’évangile de Matthieu. Ce lundi 9 janvier, nous célébrons exceptionnellement la fête du baptême du Seigneur : Mt 3, 13-17.

7. Au sortir du fleuve, une révélation

 Il vint pour être baptisé par Jean qui voulait l’en empêcher. (Mt 3, 13-14)

Il y a deux baptêmes. Le baptême d’eau, c’est l’immersion : se noyer, se plonger dans l’eau, se laver de tout son passé, de son péché. L’ablution est une pratique universelle. Le Musulman ne fait pas la prière sans pratiquer les ablutions, sans s’être purifié. De grands bassins encadrent les temples hindous où on se lave avant d’entrer au sanctuaire. C’est aussi le pourquoi des bénitiers à l’entrée de nos églises. Le baptême de l’eau dispose les cœurs au repentir. Mais Jésus a-t-il besoin d’être purifié, de se repentir ?

Il y a un autre baptême, non plus un rite de purification, mais l’expression d’une nouvelle naissance. Celle qui fait accéder au monde de l’Esprit, au monde de la foi où nous sont révélées notre véritable identité et notre vocation. « Des cieux, une voix disait : Celui-ci est mon Fils bien-aimé en qui je trouve ma joie. » (3, 17)

Jean, Jésus et le baptême

Quand Jésus s’approche de lui pour se faire baptiser, « Jean voulait l’en empêcher et disait : « C’est moi qui ai besoin d’être baptisé par toi ! » (3, 14). Et Jésus de répondre : « Laisse faire car il convient que nous accomplissions ainsi toute justice. » (3, 15) « Ce dialogue reflète la difficulté qu’éprouvaient les chrétiens du temps de Matthieu à concilier leur foi en un Christ saint et sans péché avec le baptême qu’avait reçu Jésus, selon une tradition très ancienne. On y apprend aussi quelque chose du long conflit qui opposa les disciples de Jean et ceux de Jésus. La justification donnée par Jésus : « accomplir toute justice » signifie que le plan de Dieu va s’accomplir par l’association de Jésus avec les pécheurs, alors que Jean annonçait leur extermination. » (ACEBAC, Les Évangiles, 1983)

Abbé Marcel Villers

CLÉS POUR LIRE MATTHIEU

Clés pour lire l’évangile de Matthieu
Dans cette série hebdomadaire, nous voulons fournir des clés pour ouvrir et apprécier le texte de l’évangile de Matthieu. Cette semaine : Mt 3, 1-12 du 2ème dimanche de l’Avent.

2. Le Royaume des cieux est tout proche

Produisez donc un fruit digne de la conversion. (Mt 3, 8)

Jean est vêtu de peaux de bêtes, le vêtement sauvage des premiers hommes dans leur corps à corps avec la nature. « Il portait un vêtement de poils de chameau ; il avait pour nourriture des sauterelles et du miel sauvage. » (3, 4) Que veut nous dire l’évangéliste par cette description ? « Une nouvelle humanité est en train de naître. Ce vêtement de bêtes, c’est l’habit des commencements, le costume des origines. » (J. Debruynne)

Jean invite ainsi à un nouveau commencement, une nouvelle naissance que son baptême symbolise. Mais croyons-nous qu’un autre monde est non seulement possible, mais qu’il est en train de naître ? « Préparez le chemin du Seigneur, rendez droits ses sentiers. » (3, 3) Se convertir, c’est se repentir, changer de comportement, penser autrement. C’est, au sens le plus littéral, faire demi-tour, se retourner, changer de direction. Mais pourquoi ne changeons-nous pas de route ?

Le Royaume des cieux
Matthieu écrit « des cieux » plutôt que « de Dieu » quand il parle du Règne ou Royaume annoncé. Il parle ainsi comme un juif qui évite de prononcer le nom de Dieu. « Le royaume des cieux est une notion courante dans la littérature apocalyptique juive du 1er siècle avant Jésus-Christ qui l’emprunte elle-même à l’Ancien Testament. Cette expression désigne non pas le lieu ou l’étendue du règne de Dieu (comme peut le faire le mot français de « royaume »), mais plutôt le fait que Dieu est roi, que Dieu règne. Cette royauté, ce règne n’est pas manifeste dans ce monde, mais le jour vient où elle sera pleinement manifestée. L’attente du Royaume constituait l’essentiel de l’espérance d’Israël. Ce qui est nouveau avec Jésus, la bonne nouvelle, c’est que le temps est venu, le règne de Dieu est tout proche. » (J.-J. von ALLMEN, Vocabulaire biblique, 1969)

Abbé Marcel Villers

Clés pour lire l’évangile de Jean : 36. Grand témoin

Dans cette série hebdomadaire, nous voulons fournir des clés pour ouvrir et apprécier le texte de l’évangile de Jean. Nous poursuivons la lecture continue de l’évangile. Jésus défend son œuvre face à ses adversaires : Jn 5, 31-38.

36. Le grand témoin

« Les œuvres que je fais témoignent que le Père m’a envoyé. » (Jn 5,36)

Comme témoin pour sa défense, Jésus pourrait convoquer Jean le Baptiste : « il a rendu témoignage à la vérité » (5,33), c’est-à-dire au Christ (1,15). Mais Jésus a « un témoignage plus grand que celui de Jean : les œuvres que le Père m’a donné d’accomplir » (5,36). En effet, les œuvres que Jésus accomplit sont à l’imitation de celles du Père. Ce que le Fils fait, c’est pareillement ce que fait le Père. Alors, conclut Jésus, « les œuvres que je fais témoignent que le Père m’a envoyé » (5,36).

Les paroles et les actes de Jésus révèlent à tous qui est le Père. Jésus est l’envoyé de Dieu, il est la voix de Dieu, son visage. Dieu, « vous n’avez jamais entendu sa voix, vous n’avez jamais vu sa face » (5,37). « Le Fils unique qui est dans le sein du Père, l’a fait connaître » (1,18).

Le Fils et le Père

« De l’intimité du Fils unique et de son Père sort, comme de sa source, la révélation. L’objet de cette révélation n’est pas seulement de s’opposer à l’impossibilité humaine de voir Dieu, mais aussi de communiquer aux hommes la vie qui unit le Père et le Fils. Cet acte est un acte d’amour et souligne ainsi l’aspect de gratuité absolue qui caractérise le don de la révélation identifié au don du Fils unique. A la différence des synoptiques, la figure du Fils est, pour saint Jean, la clé du comportement de Jésus, de sa parole, de son action. Elle livre le secret de sa vie, Jésus se sait le Fils envoyé par le Père. Communion de pensée et de volonté entre eux, ce mystère d’unité et d’amour est à la racine de l’existence de l’homme Jésus. Parce qu’il est le Fils, venu habiter parmi nous, il est le révélateur sans égal, seul capable d’introduire les hommes dans le secret du seul véritable Dieu, dont il manifeste le Nom de Père. » (Donatien MOLLAT, Saint Jean. Maître spirituel, 1976)

Abbé Marcel Villers

ART ET FOI. Nativité de saint Jean-Baptiste 24 juin

SAINT JEAN-BAPTISTE

Prophète, précurseur et martyr. Sa naissance (seule avec celle de Jésus et Marie) est fêtée le 24 juin, solstice d’été (Noël d’été), six mois avant celle de Jésus, solstice d’hiver.
Son martyre ou sa décollation est fêté le 29 août, date de la dédicace, au VIe s., de la basilique qui lui est consacrée à Sébaste, près de Naplouse, en Palestine.

Description du panneau

Vêtu de poils de chameau, signe d’ascèse, il désigne, en Jésus, l’Agneau de Dieu qui tient la croix ornée de l’étendard de la victoire pascale. C’est lui, par sa mort et sa résurrection, qui est la clé du livre des Écritures ou Ancien Testament dont Jean est le dernier prophète. Il tient un bâton ou un roseau (allusion à Mt 11,7) terminé par la croix à laquelle il participe par son martyre.
Jean est le fils de Zacharie et d’Élisabeth, cousine de Marie selon saint Luc. Sa naissance miraculeuse est annoncée par l’ange Gabriel qui le désigne comme le précurseur « devant préparer au Seigneur un peuple capable de l’accueillir. » (Lc 1, 17) Jean est le témoin par excellence qui annonce la venue du Messie et désigne, à ses disciples, Jésus comme l’Agneau de Dieu. (Jn 1,19-37) C’était au désert où Jean vit comme un ascète, peut-être initié à cette discipline dans les communautés juives du désert, comme celle de Qumrân.
Au bord du Jourdain, Jean pratique un rite nouveau d’ablution (Mt 3,13-17) : le baptisé ne se plonge pas seulement lui-même dans l’eau, mais reçoit l’eau et le pardon des mains d’un maître, dont il se reconnaît ainsi le disciple et qui agit au nom de Dieu. (Missel de l’Assemblée chrétienne, Bruges, 1964)

Pour la tradition chrétienne, Jean est le dernier prophète (Mt 11, 9-10), celui qui annonce la réalisation des temps messianiques tant prédits par l’Ancien Testament dont il achève le cycle. Cela explique l’effacement de Jean au profit de Jésus à qui il cède ses disciples. Précurseur, prophète, ascète, baptiste, Jean est aussi martyr. Pour avoir reproché à Hérode son immoralité, il est exécuté par décapitation et sa tête offerte à la fille d’Hérodiade. (Mc 6, 14-29)
Au IVe s., on mentionne un tombeau de saint Jean-Baptiste à Sébaste, en Cisjordanie actuelle et un autre, notamment, avec la relique de sa tête dans la Grande mosquée des Omeyyades de Damas construite, à partir de 705, sur une basilique byzantine dédiée à Jean-Baptiste.
Les feux de la saint Jean peuvent être une survivance des fêtes païennes du solstice d’été, mais s’accordent bien avec cette sentence de Jésus : « Jean était une lampe qui brûle et qui luit. » (Jn 5,35)

Jean-Baptiste appartient à deux cycles, celui de l’Incarnation et celui de la Passion. Au plafond de la nef de l’église, il occupe la première place de l’ensemble du programme iconographique de la Rédemption : son martyre annonce, en effet, celui de Jésus.

Abbé Marcel Villers
Illustration : panneau de l’église Theux 1630