Clés pour lire Matthieu : 5. La fuite en Égypte

Dans cette série hebdomadaire, nous voulons fournir des clés pour ouvrir et apprécier le texte de l’évangile de Matthieu. Cette semaine : Mt 2, 13-15.19-23 pour célébrer la Sainte Famille, cette année le vendredi 30 décembre.

5. Jésus le Nazaréen

Joseph prit l’enfant et sa mère et se retira en Égypte.
De retour, il vint habiter Nazareth. (Mt 2, 14. 23)

« Lève-toi ; prends l’enfant et sa mère, et fuis en Égypte. Hérode va rechercher l’enfant pour le faire périr. » (2, 13) La haine d’Hérode oblige à fuir. Le destin de Jésus se lit dès ses premiers jours, il connaîtra la souffrance, la persécution et sera tué, nouveau massacre de l’Innocent. Mais « d’Égypte, j’ai appelé mon fils. » (2, 15) Comme les Hébreux, persécutés par Pharaon, Jésus sortit d’Égypte et entra dans le pays d’Israël. (2, 21) Il vint habiter Nazareth en Galilée « pour que soit accomplie la parole dite par les prophètes : Il sera appelé Nazaréen. » (2, 25)

Deux noms nouveaux scandent cette anticipation de la destinée de Jésus. Il est « mon fils » dit Dieu et le Nazaréen sera son appellation la plus fréquente.

Pour que soit accomplie la parole du Seigneur
Cette formule, suivie d’une citation de l’Ancien Testament, revient une douzaine de fois dans l’évangile de Matthieu. « Il s’adresse à des gens nourris de la Bible, qui voient en elle la Parole de Dieu : ils croiront en Jésus comme Messie si sa vie et son œuvre correspondent à ce que dit la Bible. Par ces citations, Matthieu confirme la nécessité du rapport entre Jésus et l’Ancien Testament, mais il invite à renverser ce rapport : ce n’est pas la Bible qui dit ce que doit être le Christ ; c’est la foi en Jésus comme Christ qui dit comment lire la Bible. Jésus accomplit, donne un sens plein, inattendu, aux prophéties bibliques. Celui qui croit en Jésus croit aussi que, dans l’Ancien Testament, Dieu ne parle que du Christ à venir. » (Claude TASSIN, L’Évangile de Matthieu, 1991)

Abbé Marcel Villers

CLÉS POUR LIRE MATTHIEU

Clés pour lire l’évangile de Matthieu
Dans cette série hebdomadaire, nous voulons fournir des clés pour ouvrir et apprécier le texte de l’évangile de Matthieu. Cette semaine : Mt 1, 18-24 du 4ème dimanche de l’Avent.

4. Comment fut engendré Jésus Christ

Joseph, ne crains pas de prendre chez toi Marie,
ton épouse. (Mt 1, 20)

« Joseph, son époux, était un homme juste » (1, 19), c’est-à-dire un homme religieux qui n’a qu’un désir : se soumettre en tout à la volonté de Dieu. Puisque l’enfant porté par Marie vient de l’Esprit Saint » (1, 20), alors Joseph ne peut mettre la main dessus, ne peut s’arroger ce qui appartient à Dieu et à lui seul.

Mais Dieu lui donne mission, non pas de s’effacer, mais de tenir sa place d’époux près de Marie et de veiller paternellement sur l’enfant. Si Marie met au monde, c’est Joseph qui donne le nom, c’est-à-dire une identité sociale à cet enfant. Mais quel nom ? La question est capitale puisque le nom nous permettra de savoir qui est l’enfant de Marie, quelle est sa mission. Deux noms apparaissent : « Jésus, c’est-à-dire : le Seigneur sauve » (1,21) et « Emmanuel, qui se traduit : « Dieu-avec-nous. » (1, 23)

L’évangile de l’enfance selon Matthieu
Matthieu raconte l’enfance de Jésus du point de vue de Joseph, Luc plutôt du point de vue de Marie ; les perspectives sont différentes, les épisodes ne sont pas les mêmes. Chez Matthieu, pas d’annonciation, pas de nativité, pas de bergers, pas d’anges, pas de Jésus au Temple ni parmi les docteurs. Autant, en Luc, tout chante la joie et la gloire, autant chez Matthieu, l’atmosphère est plus sombre : Joseph veut s’éloigner de Marie, les Mages surprennent Hérode qui se découvre un concurrent, la furie d’Hérode entraîne la fuite et l’exil de Jésus, le massacre des innocents ; ce sera enfin le retour de Jésus, mais en Galilée par crainte du successeur d’Hérode. Dans toutes ces péripéties, le héros est indubitablement Joseph, figure d’Israël qui accueille, protège et prend soin de Jésus-Messie.

Abbé Marcel Villers

Dimanche de la Sainte Famille (A) : Va et ne crains pas !

Sainte Famille : Va vers le pays que je te montrerai (3)

Nous voici au lendemain de Noël. Nous savourons encore le bonheur de nous être retrouvés en famille. La paix, la douceur de Noël, nous souhaiterions tant les prolonger. N’est-ce pas l’ambiance idéale pour fêter la sainte famille ? Oui, mais ce n’est pas ainsi que se termine l’évangile de Noël.
« Lève-toi ; prends l’enfant et sa mère, et fuis en Égypte. Hérode va rechercher l’enfant pour le faire périr. »
Noël, c’est aujourd’hui deux fugitifs, forcés de tout laisser derrière eux pour que l’enfant soit sauvé.
Aujourd’hui dans notre monde, combien sont-ils, comme Joseph et Marie, contraints de fuir la haine, la persécution, la guerre ? Nous les voyons arriver près de chez nous.

La venue de Jésus ne coïncide pas avec paix et bonheur pour le monde. Ni hier, ni aujourd’hui. Il naît en déplacement, et de plus à l’écart, en marge : « pas de place pour lui dans la salle commune. » Il n’y a qu’une mangeoire d’animaux pour héberger le nouveau-né. Puis, c’est le massacre des innocents, l’exil, se lever, partir, fuir sur les routes vers un pays étranger. Tel est le sort de la sainte famille, et de combien de familles dans le monde.

Dans la lettre qu’il nous adresse, notre évêque invite « à nous diriger vers les périphéries géographiques mais aussi existentielles. » Nous sommes au cœur de l’évangile.
Jésus est né à la périphérie de Bethléem, à l’écart de la salle commune, hors du monde des humains, dans une mangeoire d’animaux. À peine né, il a dû fuir, s’exiler dans un pays étranger, dans la périphérie du sien. Le voilà exilé en Égypte. Prédicateur du Royaume, il sera rejeté et exclu de son peuple, livré à l’occupant, les Romains. Condamné, il sera exécuté hors de la ville, à la périphérie de Jérusalem, sur le Golgotha.
Bref, ce n’est pas au centre que Jésus a vécu, mais constamment dans les périphéries géographiques comme existentielles, préférant la compagnie des marginaux, rejetés du centre de la société : pécheurs, malades, lépreux, sourds et aveugles.

Il y a là une leçon capitale. Suivre Jésus, le rencontrer, c’est donc toujours quitter le centre pour les périphéries de notre monde, de notre paroisse, de notre Église.
C’est bien ce que l’évêque nous demande. « Il faut sortir de notre propre territoire, c’est-à-dire, de nos paroisses, de nos œuvres, de nos cercles d’habitués et aller aux périphéries, vers ces nouveaux milieux sociaux-culturels. » Mais où sont ces périphéries ? Ce sont, écrit notre évêque, ces lieux où vivent « des gens oubliés et des personnes qui ont besoin du salut. Plus que d’autres, elles ont besoin d’amitié et sont capables d’en donner. »

Il y a une sorte de connivence entre Jésus et les marginaux, entre eux et les chrétiens.
Aujourd’hui, dans notre pays, qui est engagé auprès de nos compatriotes les plus fragiles, exclus ou mis au ban de la société sinon l’Église, présente à leurs côtés, non par prosélytisme, mais pour apporter cette espérance que nous procure la Bonne Nouvelle ? Imagine-t-on notre société privée de cela ? Certes, l’Église n’est pas la seule à se préoccuper des pauvres, des réfugiés, des étrangers, des malades, des personnes âgées souvent isolées. Mais elle en prend largement sa part.

« Je veux, écrit l’évêque, encourager chacun de vous à oser sortir vers les périphéries de notre société. Ce doit être un critère d’orientation à partir duquel discerner ce qu’il nous faut quitter. » Et d’ajouter : « Le Seigneur aujourd’hui encore nous dit : Va ! et tout au long de l’histoire biblique, il ne cesse de dire : Ne crains pas ! »

Voilà des vœux pour l’année nouvelle adressés à nos paroisses et chacun de nous : Va et ne crains pas ! Puissions-nous en vivre tout au long de l’an prochain, c’est ce que je vous souhaite comme bonne année.

Abbé Marcel Villers
Homélie du dimanche de la Sainte Famille (année A)
Theux 29/12/2019
Illustration : He Qi, peintre chinois

Clés pour lire l’évangile de Matthieu 5. Jésus le Nazaréen

Dans cette série hebdomadaire (parution le mercredi matin), nous voulons fournir des clés pour ouvrir et apprécier le texte de l’évangile de Matthieu. Cette semaine : Mt 2, 13-15.19-23 du dimanche de la Sainte Famille.

5. Jésus le Nazaréen

Joseph prit l’enfant et sa mère et se retira en Égypte. (Mt 2, 14. 23)

« Lève-toi ; prends l’enfant et sa mère, et fuis en Égypte. Hérode va rechercher l’enfant pour le faire périr. » (2, 13) La haine d’Hérode oblige à fuir. Le destin de Jésus se lit dès ses premiers jours, il connaîtra la souffrance, la persécution et sera tué, nouveau massacre de l’Innocent. Mais « d’Égypte, j’ai appelé mon fils. » (2, 15) Comme les Hébreux, persécutés par Pharaon, Jésus sortit d’Égypte et entra dans le pays d’Israël. (2, 21) Il vint habiter Nazareth en Galilée « pour que soit accomplie la parole dite par les prophètes : Il sera appelé Nazaréen. » (2, 25)

Deux noms nouveaux scandent cette anticipation de la destinée de Jésus. Il est « mon fils » dit Dieu et le Nazaréen sera son appellation la plus fréquente.

Pour que soit accomplie la parole du Seigneur

Cette formule, suivie d’une citation de l’Ancien Testament, revient une douzaine de fois dans l’évangile de Matthieu. « Il s’adresse à des gens nourris de la Bible, qui voient en elle la Parole de Dieu : ils croiront en Jésus comme Messie si sa vie et son œuvre correspondent à ce que dit la Bible. Par ces citations, Matthieu confirme la nécessité du rapport entre Jésus et l’Ancien Testament, mais il invite à renverser ce rapport : ce n’est pas la Bible qui dit ce que doit être le Christ ; c’est la foi en Jésus comme Christ qui dit comment lire la Bible. Jésus accomplit, donne un sens plein, inattendu, aux prophéties bibliques. Celui qui croit en Jésus croit aussi que, dans l’Ancien Testament, Dieu ne parle que du Christ à venir. » (Claude TASSIN, L’Évangile de Matthieu, 1991)

Abbé Marcel Villers