Clés pour lire l’évangile de Matthieu 13. La règle de vie

Dans cette série hebdomadaire (parution le mercredi matin), nous voulons fournir des clés pour ouvrir et apprécier le texte de l’évangile de Matthieu. Cette semaine : Mt 5, 38-48 du 7éme dimanche ordinaire.

13. Une règle de vie, l’excès

Vous serez parfaits comme votre Père céleste est parfait. (Mt 5, 48)

Qu’est-ce que cela change d’être chrétien ? Quelle est notre différence ? A quoi peut-on nous reconnaître ? Deux indices sont fournis par Jésus. Ils sont signifiés par deux mots : « encore » et « extraordinaire ».

« Si quelqu’un te gifle sur la joue droite, tends-lui encore l’autre. Si quelqu’un veut prendre ta tunique, laisse-lui encore ton manteau. Si quelqu’un te réquisitionne pour faire mille pas, fais-en deux mille. » (5, 39-41) Ici le « encore » signifie « en plus ». On te demande une chose, donnes-en deux. Cet excès est la marque concrète, la signature des disciples de Jésus.

« Aimez vos ennemis. Car si vous aimez ceux qui vous aiment, si vous ne saluez que vos frères, que faites-vous d’extraordinaire ? » (5, 46) « Extraordinaire », voilà qui doit caractériser l’action du chrétien.

« Encore », « en plus », « extraordinaire » : ces expressions indiquent que l’excès est la marque concrète, la signature des disciples de Jésus. Car ils n’ont qu’une règle : « Vous serez parfaits comme votre Père céleste est parfait. » (5, 48)

Amour des ennemis, une exception chrétienne

« Ultime excès auquel appelle la parole de Jésus, l’exigence de l’amour de ses ennemis, décentre à l’extrême. Dépassement du principe de réciprocité et de représailles, immense provocation, cet amour des ennemis me démarque tout simplement de l’agressivité de l’adversaire et la fait retomber dans le vide ; car, que je le veuille ou non, ces ennemis demeurent des fils et des filles du Père. L’amour tient à ma manière de me tenir devant ces enfants-là : au lieu de me limiter à mes solidarités habituelles, accueillir celles et ceux qui me menacent, les décentrer de leur méchanceté autant que me décentrer moi-même. Au lieu d’une exhortation forcément inatteignable (« soyez parfaits »), la parole de Jésus résonne comme une lumineuse promesse : Vous serez parfaits. » (Isabelle GRAESSLÉ, Prier 7 jours avec l’évangile de Matthieu, 2010)

Abbé Marcel Villers

Clés pour lire l’évangile de Matthieu 12. Moi, je vous dis

Dans cette série hebdomadaire (parution le mercredi matin), nous voulons fournir des clés pour ouvrir et apprécier le texte de l’évangile de Matthieu. Cette semaine : Mt 5, 17-37 du 6éme dimanche ordinaire.

12. Eh bien ! moi, je vous dis

Je ne suis pas venu abolir, mais accomplir. (Mt 5, 17)

« Si votre justice ne surpasse pas celle des scribes et des pharisiens, vous n’entrerez pas dans le Royaume des Cieux. » (5, 20) Il est clair que pharisiens et scribes appliquaient, et scrupuleusement, la Loi de Dieu. Mais, pour Jésus, cette application avait tendance à rester extérieure. Il la veut intérieure, venant d’un acte libre, délibéré et personnel. Il n’est pas question d’un rigorisme accru dans l’obéissance à la Loi, mais d’un engagement plus personnel parce que plus intériorisé.

Jésus n’ajoute rien à la Loi de Moïse et aux prescriptions qui en découlent. Il ne fait que mettre en évidence la nécessité d’aller aux racines, les causes comme les motifs de l’action. Si l’on condamne le meurtre, il faut aller jusqu’à sa racine qui est la colère, l’insulte ou la malédiction. De même pour l’adultère : « tout homme qui regarde une femme avec convoitise a déjà commis l’adultère avec elle dans son cœur. » (5, 28) Enfin, dans le domaine du langage, « que votre parole soit « oui » si c’est « oui », « non », si c’est « non ». » (5, 37)

Vous avez appris… Mais moi, je vous dis.

« Jésus semble ne s’autoriser que de lui-même, sans s’appuyer sur aucune autorité reconnue et vérifiable. Chaque évangile insiste sur l’autorité souveraine de Jésus. En disant : « Mais moi, je vous dis », Jésus ne se contente pas de s’opposer à Moïse ; il met son moi sur le même plan que le moi de Dieu. Car la Loi ne fait autorité qu’en tant qu’elle a été donnée par Dieu, et Moïse qu’en tant que son médiateur. De même quand il introduit un propos par la formule : « Amen, je vous le dis », Jésus revendique Dieu pour auteur de sa propre parole. Son amen garantit la vérité de sa parole comme vérité de Dieu. Jésus ose parler et agir à la place de Dieu. C’est Dieu et nul autre qui fonde sa parole. » (Heinz ZAHRNT, Jésus de Nazareth. Une vie, 1996) Cette autorité de Jésus a frappé ses contemporains et révèle une expérience de Dieu unique : il est le Fils.

Abbé Marcel Villers

Clés pour lire l’évangile de Matthieu 11. Sel et lumière

Dans cette série hebdomadaire (parution le mercredi matin), nous voulons fournir des clés pour ouvrir et apprécier le texte de l’évangile de Matthieu. Cette semaine : Mt 5, 13-16 du 5éme dimanche ordinaire.

11. Sel et lumière pour les hommes

Voyant ce que vous faites de bien, ils rendront gloire à votre Père.
(
Mt 5, 16)

« Vous êtes le sel de la terre. Vous êtes la lumière du monde. » Il n’est pas dit : « vous devez être le sel, vous devez être la lumière. » Cela ne dépend pas de la volonté des disciples d’accepter ou non. Jésus ne leur lance pas une invitation à être sel ou lumière. Ils le sont, qu’ils le veuillent ou non, par leur réponse à l’appel de Jésus.

« Que votre lumière brille devant les hommes : alors, voyant ce que vous faites de bien, ils rendront gloire à votre Père qui est aux cieux. » (5, 16) Il ne s’agit pas de faire des discours ou de mener des actions de propagande, mais d’être ce que nous sommes, des disciples de Jésus. Le rayonnement des disciples n’est pas un but, c’est un fait : « la lampe brille. »(5, 15) C’est de surcroît qu’elle peut amener les hommes à rendre gloire à Dieu.

« Vous êtes le sel de la terre et lumière du monde. »

La double image évangélique du « sel de la terre » et de « la lumière du monde » sert souvent à caractériser des manières distinctes, voire successives, de se situer comme chrétiens dans la société. Au long du XXe siècle, on a vécu ces deux modalités de présence et d’action. Les chrétiens se sont d’abord profondément immergés dans la société y œuvrant avec tous à l’avènement d’un monde nouveau. On a parlé ainsi d’enfouissement, à l’image de ces prêtres se faisant ouvriers. La fin des années 70 marqua un déclin de cette posture de discrétion chrétienne. L’heure était venue d’une nouvelle stratégie, celle d’une visibilité assumée. Et aujourd’hui, en Belgique, discrétion ou visibilité, sel ou lumière ? N’est-il pas venu le moment d’un catholicisme affirmatif ?

Abbé Marcel Villers

Clés pour lire l’évangile de Matthieu 10. Réjouissez-vous !

Dans cette série hebdomadaire (parution le mercredi matin), nous voulons fournir des clés pour ouvrir et apprécier le texte de l’évangile de Matthieu. Cette semaine : Mt 5, 1-12 du 4éme dimanche ordinaire, remplacé cette année par la fête de la Chandeleur.

10. Réjouissez-vous !

Heureux les pauvres de cœur, car le royaume des Cieux est à eux.
(Mt 5, 3)

« Réjouissez-vous. Heureux êtes-vous. » (5, 12) C’est à ses disciples que Jésus s’adresse. Il s’adresse à ceux-là qui l’entourent, ceux qui ont répondu à son appel. Et Jésus de leur décrire ce qui les attend, leur avenir. Ils ont obéi à son appel, renoncé à tout pour le suivre. Cet appel a fait d’eux, de nous, des pauvres, des gens que l’on combat, des affamés.

« Heureux êtes-vous », nous déclare Jésus. Heureux à cause de l’appel de Jésus auquel nous avons répondu. Et Jésus de dresser le portrait de ses disciples : des pauvres de cœur, des doux, des affligés, des affamés de justice, des miséricordieux, des cœurs purs, des artisans de paix, des persécutés en raison de leur engagement pour la justice, c’est-à-dire pour leur obéissance à la loi de Dieu.

Les discours de Jésus dans l’évangile de Matthieu

L’évangile matthéen est construit en cinq grandes parties organisées sur le schéma gestes/paroles qui se traduit littérairement par une suite de récits et de discours. Ainsi les paroles de Jésus éclairent ses gestes. Cinq grands discours ponctuent le texte de Matthieu. Ils correspondent symboliquement aux cinq livres de la Torah, cœur de la Loi juive à laquelle Matthieu et sa communauté se réfèrent et réinterprètent à la lumière de leur foi en Jésus Christ. L’objectif de Matthieu serait de présenter la nouvelle Torah, celle des chrétiens. Jésus est ainsi désigné comme le nouveau Moïse, considéré comme l’auteur des cinq livres de la Loi.

Les cinq discours de Matthieu sont : celui sur la montagne ou le nouveau chemin de vie (chapitres 5-7) ; le discours de mission (chapitre 10) ; le discours en paraboles ou le mystère du Royaume (13) ; le discours sur la vie en communauté (18) ; le discours sur la fin des temps ou le jugement du monde (24-25).

Abbé Marcel Villers