Clés pour lire l’évangile de Jean : 21. Crucifié dans un jardin

Dans cette série hebdomadaire, nous voulons fournir des clés pour ouvrir et apprécier le texte de l’évangile de Jean. En ce vendredi-saint, nous lisons la Passion de Jésus selon saint Jean :  Jn 18,1-19,42.

21. Crucifié dans un jardin

Au lieu où il avait été crucifié se trouvait un jardin, et dans le jardin un tombeau neuf. (Jn 19,41)

« Tout est accompli » (19,30). Telle est la dernière parole de Jésus. Ce n’est pas un cri de douleur ou de déréliction, mais un cri de victoire : Jésus a réussi. Il a achevé son œuvre. Pour l’évangile de Jean, la croix n’est pas un fait divers, mais un sommet, celui de la révélation de Dieu. Elle en est l’étape ultime, cette « heure » vers laquelle marchait Jésus. Elle est l’élévation du Fils et non sa défaite. La croix n’est pas l’échec de Jésus, mais bien le couronnement de sa mission. En Jésus, le Dieu invisible s’est rendu visible. La croix en est l’accomplissement : c’est elle qui dit le mieux qui est notre Dieu. « Nous avons vu sa gloire » (1,14), écrit St Jean.

Pour son Fils qui est sa gloire, c’est-à-dire, la manifestation de son être, Dieu choisit l’humilité, la pauvreté, la croix. La gloire de Dieu passe par la croix. Ou plutôt, elle prend la forme de la croix. Car sa gloire n’est pas autre chose que son amour. On comprend pourquoi la croix est l’emblème par excellence de la foi chrétienne, elle est révélation de l’amour fou de Dieu pour l’homme.

Le disciple que Jésus aimait

Dans six passages de l’évangile de Jean citant « le disciple que Jésus aimait », tous situés dans la dernière partie (chapitres 13 à 21), ce disciple est mis en parallèle avec Simon-Pierre, qu’il précède toujours et même lui sert d’intermédiaire : il le fait entrer dans le palais du grand prêtre, court plus vite que lui au tombeau, reconnaît Jésus le premier au bord du lac et le dit à Pierre. La première scène où apparaît le disciple que Jésus aimait (13,21), il est « couché sur la poitrine de Jésus » : cette proximité physique signifie plus qu’une présence matérielle, une communion profonde avec le maître. Témoin fidèle jusqu’au bout (19,26 ; 21,24), il sera, par son évangile écrit, la figure exemplaire de celui qui a compris le maître. Cela ne nous permet pas de l’identifier avec certitude. Il ne peut être Lazare, le seul homme connu qu’on nomme « aimé de Jésus » (11,5). Il est illusoire de le réduire à une figure symbolique du croyant parfait. Ce symbolisme existe mais il s’appuie sûrement sur une réalité historique. L’évangile de Jean a été reçu dans l’Église parce qu’à son origine, il y a une figure historique de premier plan, qui avait accompagné Jésus depuis le commencement de sa mission. (D’après Alain MARCHADOUR, L’Évangile de Jean, 1992)

Abbé Marcel Villers

ART ET FOI. VENDREDI-SAINT : la croix ou l’art d’aimer

Cette douzième station du chemin de croix de l’église de Jehanster est l’œuvre des ateliers de Maurice Denis (1870-1943), peintre français rénovateur de l’art religieux chrétien. Fruit d’un mécénat privé, ce chemin de croix fut installé en 1924 dans l’église dont il constitue une des pièces remarquables.

Observons la scène et méditons.
La croix de Jésus est élevée entre deux brigands.
Au-dessus de la croix de Jésus, une inscription en trois langues (hébreu, grec, latin) : « Jésus le Nazaréen, roi des Juifs ».
Le monde est plongé dans l’obscurité. L’ancien monde craque sous le feu du ciel. Le bois de la croix semble en flammes.
Le centurion prend sa tête entre les mains dans un geste de désespoir.
Au pied de la croix, Marie-Madeleine, à genoux, est en prière.
De l’autre côté, Marie, une parente, et Jean, soutiennent la mère de Jésus dont le corps penche vers son enfant.

« Les visages sont esquissés, les silhouettes sommaires. La nuit a recouvert le monde et les êtres. Seul le visage de Jésus est dessiné dans une infinie précision comme si son corps ne devait jamais se corrompre. » (Paule AMBLARD-Maurice DENIS, Le chemin de croix de Jésus, Paris, 2015)

Visage paisible du Christ : ce n’est pas la souffrance qui nous sauve, mais l’amour.

« Ma vie, nul ne la prend, mais c’est moi qui la donne. » (Jn 10, 18)

Abbé Marcel Villers