SOURCES : 17. L’appel de l’enfant

SOURCES

Dans cette rubrique, il est question de sources, celles qui nous font vivre, celles qui donnent sens à notre action, celles qui contribuent à construire notre identité.  Aujourd’hui comme hier, nous avons besoin de boire à ces sources pour vivre et donner sens à notre engagement.  Chaque jeudi, vous est proposé un texte à lire, méditer, prier.

Abbé Marcel Villers

17. L’APPEL

Nous ne pouvons rien par nous-mêmes, sinon appeler, comme l’enfant qui ne sait pas encore marcher et pleure pour attirer sa mère. C’est le salut par l’amour.

« Il n’est pas vrai comme le soutiennent certains, abusés par l’erreur, que l’homme soit irrémédiablement mort et ne puisse plus rien accomplir de bon.
Un petit enfant est incapable de tout : il ne peut accourir sur ses propres jambes vers sa mère, mais il se roule à terre, il crie, il pleure, il appelle. Et elle s’attendrit, elle est toute émue de voir son enfant la chercher avec tant d’impatience et de sanglots. Il ne peut la rejoindre, mais il l’appelle inlassablement, et elle vient vers lui, bouleversée d’amour, elle l’embrasse, le presse sur son cœur, lui donne à manger avec une tendresse ineffable.

Dieu nous aime. Et il se conduit comme elle à l’égard de l’âme qui le cherche.

Dans l’élan de cet amour infini qui est le sien, il s’attache à notre esprit, s’unit à lui et ne fait plus qu’un avec lui. L’âme se joint au Seigneur et le Seigneur, rempli de compassion et d’amour, vient et s’unit à elle et elle demeure dans sa grâce. Alors l’âme et le Seigneur ne font qu’un seul esprit, une seule vie, un seul cœur. »

Pseudo-Macaire (autour de 400), Quarante-sixième Homélie.
Dans la théologie de ce moine de Mésopotamie ou Asie mineure, même après le baptême, le combat entre la grâce et le mal continue dans les profondeurs de l’homme. Il reste à appeler au secours, à crier du fond même du désespoir. De profundis clamavi!

SOURCES : 7. Passion d’amour

Question de sources

Voici une nouvelle rubrique hebdomadaire où il est question de sources, celles qui nous font vivre, celles qui donnent sens à notre action, celles qui contribuent à construire notre identité. Nous nous inscrivons dans une histoire riche et variée. Notre identité relève des Évangiles mais aussi d’un patrimoine spirituel immense exprimé sous diverses formes, monumentales, littéraires, artistiques.
Aujourd’hui comme hier, nous avons besoin de boire à ces sources pour vivre et donner sens à notre engagement. Nous irons en particulier à la découverte des Pères de l’Église. Chaque semaine, nous vous proposerons un texte à lire, méditer, prier.
Abbé Marcel Villers


Une passion d’amour

Le cœur de la foi chrétienne, c’est la reconnaissance que Jésus est l’exégète du Père. « Dieu, nul ne l’a jamais vu ; le Fils unique qui est dans le sein du Père, lui, s’en est fait l’interprète. » (Jn 1,18)

Et cependant, en Jésus, le mystère de Dieu est tout autant voilé que dévoilé. En effet, le Dieu inaccessible se révèle dans un Crucifié, scandale pour la raison comme pour la religion. C’est que Jésus « n’a pas été envoyé seulement pour être reconnu, mais aussi pour demeurer caché. » (Origène, Contre Celse, 2, 67) Oui, Dieu reste un Dieu caché. La croix déconcerte nos définitions et nos attentes.

En Jésus, la gloire est inséparable de la kénose, la divinité de l’humain, la vie de la mort. Comment saisir l’identité écartelée du Très-Haut et de la Croix, du Dieu Tout-Puissant et de l’Homme de douleurs ? Peut-être en y discernant la révélation de l’amour fou de Dieu pour l’humain.

« Si le Christ est descendu sur terre, c’est par compassion pour l’humain. Oui, il a souffert nos souffrances avant même d’avoir pris notre chair. Car s’il n’avait souffert, il ne serait pas venu partager avec nous la vie humaine. Mais quelle est cette passion qu’il a ressentie pour nous ? C’est la passion de l’amour. » (Origène, Sixième homélie sur Ezéchiel, 6, 6)

Compassion, passion. On dirait aujourd’hui : solidarité. Solidarité d’amour qui sollicite humblement et discrètement notre propre amour. Solidarité ontologique avec l’humain qui fait de Jésus notre frère. En vertu de cette solidarité d’être et d’amour, le Christ Jésus a pris sur lui toute la haine, la révolte, la dérision, le désespoir, tous les meurtres, toutes les tortures, toutes les agonies des hommes pour les remettre entre les mains du Père.
Alors la vie absorbe la mort, la haine se consume dans l’abîme de l’amour. Et l’univers est restauré, l’homme rénové.

Abbé Marcel Villers


Origène (185-254) reçoit une formation littéraire et théologique solide à Alexandrie où il est bientôt chargé d’enseignement dans l’École catéchétique. Il s’établit ensuite à Césarée, en Palestine, où il enseigne et prêche. Il devient prêtre et poursuit une œuvre considérable surtout dans le domaine de l’exégèse biblique. Interdit à Alexandrie, il poursuit son enseignement en Palestine et Syrie. Il meurt martyr à Tyr.

La chronique de notre Curé du 25 juillet 2021

De la solidarité
à la fraternité

Durant la période de la guerre froide, le romancier existentialiste Albert Camus disait : « C’est le propre de chaque nouvelle génération de vouloir refaire le monde. La mienne y a renoncé mais elle a toutefois reçu une mission sans doute unique dans l’histoire de l’humanité : celle d’éviter que le monde ne se défasse ». Pour des raisons diverses, notre génération et les suivantes ont, me semble-t-il, à assumer des responsabilités aux deux niveaux : éviter que le monde ne se défasse et construire une autre manière de faire société. Ceci, hélas, n’est pas une utopie ou un vœu pieux, c’est de plus en plus une urgence qui s’impose. Le 21 juillet 2020, nous étions dans un répit de la pandémie de la Covid19, crise sanitaire qui est loin d’être terminée. En ce 21 juillet 2021, alors que des coins de la planète souffraient de chaleurs exceptionnelles, la Belgique avec ses voisins comptaient les morts et les disparus ainsi que les dégâts d’inondations inimaginables dues à un blocage dépressionnaire durant 48 heures. Qu’attendre du 21 juillet 2022 ? L’avenir nous le dira. Espérons que ce seront d’heureuses et paisibles retrouvailles nationales qui ne seront pas perturbées par je ne sais quel événement extrême ! Lire la suite « La chronique de notre Curé du 25 juillet 2021 »

Clés pour lire l’évangile de Marc : 28. Des brebis sans berger

Clés pour lire l’évangile de Marc

Dans cette série hebdomadaire (parution le mercredi matin), nous voulons fournir des clés pour ouvrir et apprécier le texte de l’évangile de Marc. Cette semaine : Mc 6,30-34 du 16e dimanche du temps ordinaire.

28. Des brebis sans berger

Il fut saisi de compassion envers eux et se mit à les enseigner. (Mc 6,34)

L’enseignement de Jésus, sa parole, est la manifestation de sa « compassion » envers la foule. Curieux remède à la quête de ces gens « sans berger » ! Sauf si on entend par « parole », l’évangile que nous lisons chaque dimanche, cette « bonne nouvelle » qui comble l’homme en quête de sens et de vie.

Comparée à des brebis sans berger, cette foule dispersée et disparate, Jésus la rassemble et la nourrit par la puissance de sa parole qui naît de sa « compassion ». On traduit ainsi un terme qui, en hébreu, désigne le sein maternel, l’utérus, siège de la tendresse d’une mère pour ses enfants. La compassion de Jésus est cette émotion qui monte des profondeurs physiologiques : il est remué aux entrailles devant la souffrance des hommes. Nous est ainsi révélé l’amour maternel de Dieu pour ses enfants.

Brebis, berger et pâturage

La première mission du berger est d’être un rassembleur. Lorsqu’au petit matin, le berger ouvre la porte de l’enclos où les brebis ont passé la nuit, il pousse son cri de ralliement. Aussitôt les brebis se pressent à la porte. Elles ont reconnu sa voix et se rassemblent autour de lui qui va les mener vers les eaux tranquilles et les verts pâturages.

La symbolique biblique est claire : le berger est la figure du roi qui rassemble, dirige et conduit son peuple. Les prophètes ont annoncé un successeur du roi par excellence qu’était David et qui sera pasteur de son peuple à la manière de Dieu lui-même. Ce bon berger tant attendu est le Messie qui prendra soin de toutes ses brebis, particulièrement celles qui sont perdues ou malades. (Ez 34)

S’articulent, dans la figure du berger, celles du roi et du serviteur. Faire paître le troupeau à la manière de Dieu, c’est montrer une immense prévenance pour les brebis les plus faibles, se mettre à leur service, et ainsi être roi. Telle est bien la conception que se fait Jésus du Messie. (Philippe BACQ, Un goût d’Évangile, 2006)

Abbé Marcel Villers